« I’m back », l’annonce qui a chamboulé la NBA

Il y a 27 ans, Michael Jordan annonçait son retour en NBA après un an et demi de retraite. La légende a pu continuer de s'écrire.

« I’m back », l’annonce qui a chamboulé la NBA
18 mars 1995. Le web n'en est qu'à ses balbutiements et Twitter n'existe pas. Pas de "Woj bomb" pour dévoiler des scoops au grand public. Adrian Wojnarowski n'est à cette époque qu'un journaliste débutant dans le Fresno Bee, un quotidien californien. David Falk, l'agent de Michael Jordan, prend donc son téléphone pour prévenir les organes de presse sportifs principaux qu'un communiqué leur parviendra par le biais d'un fax dans la soirée. Plusieurs d'entre eux comprennent immédiatement. La rumeur avait fait son chemin, mais rien d'officiel n'était jusque-là venu l'étayer. MJ, retraité depuis un an et demi, va annoncer son retour en NBA. Pas dans le cadre d'un show télévisé, ni dans une lettre "à coeur ouvert" comme le feront la plupart des athlètes 20 ans plus tard. A une époque où les stars s'attachent les services de professionnels pour leur écrire des déclarations convaincantes et éloquentes, les médias s'attendent à recevoir une déclaration construite, développée. Une profession de foi où la star rappellerait pourquoi le jeu et l'engouement des fans lui manquent. Rien de tout ça. Sous le préambule très administratif, trois petits mots passés à la postérité sont couchés sur le papier, entre deux guillemets : "I'm back". Michael Jordan et la partie de cartes de 36 heures qui a repoussé son retour en NBA De retour, certes, mais pour faire quoi ? Durant l'absence de Michael Jordan, le visage de la ligue a mine de rien un peu changé, avec la prise de pouvoir des Houston Rockets d'Hakeem Olajuwon. Des questions entourent ce comeback. Les analystes se demandent ouvertement si cette décision est pertinente. Physiquement, peut-il seulement proposer la même intransigeance à 32 ans, tout génie du jeu qu'il est ? Revenir sous un visage moins parfait, moins exceptionnellement performant, nuira sans doute à sa légende. Il reste 17 matches à jouer en saison régulière. Phil Jackson est, à cet instant, au bord de la dépression. Comme il le confiera plus tard dans l'un de ses livres, il aurait sans doute quitté le navire au terme de la saison si Jordan n'était pas revenu. Le bilan des Bulls est tout juste à l'équilibre. Parmi ceux qui n'ont pas côtoyé l'icône lors de son premier run, certains s'inquiètent un peu de l'arrivée de cette personnalité écrasante et au tempérament orageux dans le vestiaire. Il y aura effectivement des remous avant que le succès ne revienne la saison suivante. Des mots et des coups de poings échangés, comme avec Steve Kerr. D'autres accueillent la nouvelle avec émotion. Toni Kukoc, difficilement accueilli par un Scottie Pippen jaloux, racontera plus tard avoir fondu en larmes. Des sanglots de bonheur. Kukoc avait justement quitté l'Europe pour Chicago dans le but d'évoluer avec l'une des ses idoles. Le premier match de l'icône n'est pas franchement idéal, si ce n'est pour NBC. La chaîne fait un carton d'audience sur ce Pacers-Bulls dans l'Indiana. Sur le terrain, Michael Jordan parait logiquement un peu rouillé. Il n''inscrit "que" 19 points à 7/28 lors de la défaite des siens.
Après un succès à Boston où on commence à retrouver des fulgurances de l'inégalable talent du bonhomme, vient le moment tant attendu. Son premier match à la maison contre Orlando, épouvantail à l'Est, le 24 mars.

Michael Jordan, mieux qu'Elvis, les Beatles et Tyson

Tout ne se passe pas non plus aussi bien qu'espéré sur le terrain, où les Bulls s'inclinent de 7 points. En playoffs, quelques semaines plus tard, Nick Anderson osera même dire après un steal sur Jordan, vêtu du #45 le temps que son mythique #23 soit décroché du toit du United Center dans le money time :
"N°45 n'est pas aussi explosif que n°23. Jamais je n'aurais pu faire ça à n°23".
En revanche, l'à-côté est incroyable. L'accueil que lui réserve le public du United Center est monumental. Ernie Johnson, déjà à l'antenne à cette époque, réussit l'introduction parfaite lors de sa prise d'antenne.
"Vous pourriez avoir Elvis Presley en première partie du concert de réunification des Beatles avec un combat de Mike Tyson dans la foulée, que ce ne serait pas suffisant pour faire mieux que le retour de Michael Jordan à Chicago".
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Double Nickel et suite de l'histoire

Il ne faut pas longtemps à "MJ" pour être à nouveau touché par la grâce malgré ces débuts poussifs. Peu avant le déplacement des Bulls au Madison Square Garden pour affronter les Knicks, il accorde une interview à Ahmad Rashad de NBC, lequel lui pose une question étonnamment prémonitoire. "Quand les fans verront-ils une explosion dans votre jeu ? Le genre de match où vous marquez 55 points..."
"Ce n'est qu'une question de temps", avait répondu un Jordan mystique mais à la fois très confiant.
On comprendra mieux l'assurance de celui qui porte alors le numéro 45 (le temps que son mythique #23 soit décroché du toit du United Center) quelques jours plus tard. Le 28 mars, au Madison Square Garden, l'un de ses jardins, il marque 55 points tout pile (21/37 au shoot, 3/4 à 3 pts). Le fameux "Double Nickel Game", partie intégrante de sa légende. Beaucoup y voient le point de départ d'une ascension vers son meilleur niveau. Et la confirmation que sa quête d'un nouveau Three Peat n'est sans doute pas illusoire. Une fois l'élimination en demi-finale de Conférence contre Orlando disséquée et digérée, la suite n'est effectivement qu'histoire.