Pas mal de joueurs, à commencer par Kyrie Irving, pensent qu’il serait peut-être préférable de ne pas redémarrer cette saison. Mais LeBron James ne partage pas cet avis. Et certains, même si c’est en off, n’hésite pas à affirmer que les arguments du King sont très personnels. Voire égoïste ?
On le sait désormais, il y a eu ce weekend une conference call réunissant un gros paquet de joueurs pour discuter de la pertinence de reprendre la saison NBA ou pas. Kyrie Irving et de nombreux NBAers pensent qu’il serait préférable de ne pas interrompre la lutte contre les discriminations. Ou de ne pas « détourner » le public de cette cause, en proposant un spectacle qui accaparait une partie de l’actualité. Bref, ne pas tomber dans le « Panem et circenses », « du pain et des jeux », cette expression utilisée pour dénoncer la stratégie des empereurs romains de proposer au peuple à manger et des jeux pour s’attirer la bienveillance du peuple. Et l’endormir.
Un débat vieux comme le monde divise donc les joueurs NBA. Faut-il boycotter la reprise pour consacrer toute l’énergie à la lutte et surtout ne pas proposer une actualité à même de calmer les contestataires et donc de desservir leur cause ? Ou faut-il au contraire utiliser cette fin de saison NBA comme une plateforme permettant de toucher encore plus de monde ? Ce débat divise la ligue. Et même les équipes, à l’image des Los Angeles Lakers où Dwight Howard est plutôt du côté Kyrie Irving alors que LeBron James souhaite une reprise de la saison. LBJ a d’ailleurs refusé de participer au meeting.
Pour de plus en plus de monde dans la ligue, ce serait pour des raisons personnelles plutôt que des raisons relevant de la stratégie politique du combat. C’est Pat Beverley qui le sous-entendait déjà dans un twitt à plusieurs niveaux de lecture. En off, des General Managers pensent que LeBron James tient absolument à finir la saison parce qu’il sait que les deux prochaines années auront un impact considérable sur sa legacy.
« Il est définitivement dans la discussion, mais est-ce que quelqu’un peut dire qu’il est meilleur ? Non, pas encore », explique un dirigeant d’une franchise de l’Est à ESPN à propos de son duel avec Michael Jordan pour le statut de GOAT . « Il va avoir besoin de gagner cinq titres au moins. »
Un dirigeant de l’Ouest pense, lui, qu’avec quatre titres LeBron James passerait devant Michael Jordan. Et que c’est pour ça qu’il va absolument faire en sorte que la saison NBA reprenne :
« LeBron va s’assurer que ces matches à Orlando seront joués, parce qu’il sait qu’il pourrait avoir un énorme impact sur sa legacy. Il sait que glaner un titre ou deux supplémentaires est le potentiel point de bascule (pour devenir le GOAT), et il est déterminé à aller les chercher. »
Sous-entendu : à son âge, il n’aura plus trente-six opportunités pour choper une bague.
Alors bien sûr, il ne faut pas voir LeBron James comme un égoïste qui se fiche du combat contre les discriminations et du mouvement Black Lives Matter. Il a largement prouvé qu’il utilisait sa voix plus que quiconque pour ces causes. Mais pour quelques voix dans la ligue, sa situation personnelle influe grandement sur la manière dont il pense que ce combat doit être mené.
Est-ce réellement un tort ? Peut-être que le boycott est une solution forte, qui marquera les esprits. C’est même sûr. Mais est-il honteux de vouloir mener le combat tout en essayant de continuer à faire son métier et sa passion ? Que ce soit pour choper des titres. Ou, pour des joueurs de moindre calibre, être payé et continuer à jouer.