Voici ce qu'il fallait retenir de la Coupe du monde 2019 de basket.
La Coupe du monde 2019, c'est fini ! Et c'est une très belle cuvée à laquelle on a eu droit, autant en tant que supporters des Bleus que comme simples fans de basket. Il y a eu des surprises, des confirmations et des promesses. Tout ce qui fait que l'on a déjà hâte d'être en 2020 à Tokyo pour voir à nouveau ces sélections en action. Voici ce que l'on a retenu des deux semaines de compétition en Chine.
Marc Gasol, direction le Hall of Fame ?
Il y a quelques mois, Marc Gasol faisait la moue à Memphis et se demandait si, à 33 ans, il allait un jour avoir une vraie chance de remporter un titre NBA. Même en étant tradé à Toronto, rien ne lui garantissait cette issue... Pourtant, l'Espagnol a joué un rôle-clé dans la conquête du titre des Raptors. Et le voilà qui enchaîne avec un deuxième titre mondial sous le maillot de son équipe nationale ! Un Graal que beaucoup pensaient inaccessible en raison de la présence d'une équipe américaine toujours suffisamment solide pour empêcher la Roja ou un autre challenger de la détrôner.
En demi-finale contre l'Australie, le "Big Burrito" a été magnifique (33 points) et pousse aujourd'hui les supporters de l'équipe rivale (coucou, c'est nous), à s'incliner devant sa classe et son talent. Avec un titre de meilleur défenseur NBA, une bague de champion et une victoire en Coupe du monde (le parcours en FIBA est un paramètre qui compte), Marc Gasol a vu ses chances d'intégrer le Hall of Fame de Springfield dans quelques années augmenter drastiquement. Et puisque Pau Gasol ira sans doute lui aussi, on aura peut-être droit au deuxième tandem de frères de l'histoire du HoF après les frangins Dick et Al McGuire.
Après "Beat Spain !", pourquoi pas "Be Spain" ?
Ça devient quand même de plus en plus difficile de détester l'Espagne du sport de manière irrationnelle. On peut trouver ponctuellement quelques joueurs agaçants (coucou Rudy Fernandez), mais comment ne pas respecter la constance et la culture de la gagne de la Roja ? Même sans plusieurs de leurs meilleurs joueurs, à la retraite ou absents du tournoi, les joueurs de l'immense Sergio Scariolo ont développé leur jeu, reconnaissable entre mille, et écarté tous ceux qui se sont dressés sur leur chemin. Nos Bleus sont de plus en plus réguliers depuis 10 ans et c'est bien ce modèle de constance et d'identité basket que prônent les Espagnols dont il faut s'inspirer. Et ça ne nous empêchera pas de gentiment leur rentrer dans le lard si par bonheur on venait à les affronter dans un match-clé d'une compétition internationale. Au hasard l'été prochain aux Jeux Olympiques de Tokyo...
Team USA n'a plus de marge
Une équipe coachée en tandem par une légende du jeu (Gregg Popovich) et un disciple (Steve Kerr) qui a presque déjà atteint le total de bagues de son maître, ça ne suffit pas à remporter une Coupe du monde. On savait que ce roster des Etats-Unis était le plus "faible" depuis des années et paraissait même moins compétent que certaines années où les Américains avaient chuté. "Avec un bon coaching, ça peut passer", se disait-on. C'était sous-estimer le niveau des autres sélections nationales, à commencer par la nôtre, et leur capacité à jouer les yeux dans les yeux avec des joueurs NBA.
Aucun des 12 joueurs de l'effectif ne faisait partie des 15 meilleurs basketteurs du monde, malgré le respect que l'on peut avoir pour un multiple All-Star comme Kemba Walker ou un joueur à l'avenir brillant comme Donovan Mitchell. Sans superstar, les Etats-Unis n'ont pas eu ce boost nécessaire face à des adversaires venus avec le couteau entre les dents. Les Bleus, pour commencer, et leurs cadres rompus aux joutes de la NBA, puis les Serbes et leur talent collectif, désireux de se rattraper d'un quart de finale raté. Il est probable que l'Argentine et l'Espagne auraient posé au moins autant de problèmes à Team USA et confirmé cette impression : les Etats-Unis ne peuvent plus se permettre d'envoyer une équipe moyenne dans une compétition internationale.
Ça s'annonce bien pour le Jazz
Quin Snyder aurait sans doute préféré que ses meilleurs joueurs bénéficient d'un été plein en termes de récupération et de préparation. Mais accumuler la confiance et les prestations individuelles très solides avec leur pays comme l'ont fait Rudy Gobert (3e avec les Bleus), Joe Ingles (4e avec l'Australie) et Donovan Mitchell (meilleur joueur de Team USA pendant le tournoi), peut aussi être une plus-value à un mois de la reprise de la saison NBA. Le Jazz a de grandes ambitions cette saison avec le renfort, notamment, de Mike Conley et on surveillera les prestations de ses mondialistes de près.
Don't cry for us Argentina
On en a forcément un peu voulu aux Bleus de ne pas avoir "matché" l'agressivité argentine et la passion qui s'est dégagée du basket de l'Albiceleste en demi-finale. Mais ce qu'ont proposé Luis Scola et ses camarades/enfants du début à la fin du tournoi en termes d'intensité et de pep's était quasiment du jamais vu. Le basket proposé, collectif et éreintant, était tout simplement splendide. On avait sans doute jamais vu une équipe défendre aussi dur et fort contre la Serbie et la France. De l'autre côté du terrain, la balle bouge, les joueurs sont en mouvement perpétuel et constamment agressifs. En dehors de la coupe de cheveux de Tayavek Gallizzi, tout était enthousiasmant dans cette partition argentine, avec un groupe qui "vit bien" comme le veut le lieu commun.
Malade est Serbie
La Serbie avait démarré ce tournoi à 10 000 à l'heure avec des écarts de points effrayants et un style qui laissait présager du meilleur. Puis, progressivement et dès le 2e tour contre l'Espagne, on a senti quelque chose se casser. Dès qu'une difficulté s'est présentée, les Serbes se sont délités et l'harmonie collective a explosé, laissant place à une forme de paresse et de léthargie. Rappelons que Sasha Djordjevic, coach démissionnaire après l'élimination en quarts de finale, avait annoncé son intention de battre Team USA, (ce qui a été chose faite mais dans un match pour la 5e place...) et de remporter le titre mondial.
Même avec la présence de Nikola Jokic, phénoménal en NBA avec Denver et nettement moins à son aise dans ce contexte FIBA, et de l'artilleur Bogdan Bogdanovic, la Serbie a failli. Attention tout de même à l'orgueil local et au retour probable de Milos Teodosic, l'architecte des meilleures performances récentes de son équipe nationale, pour les JO 2020.
Nando <3
On a adoré l'avènement d'Evan Fournier en termes de leadership et de force de frappe offensive. On en a suffisamment parlé pendant cette Coupe du monde, sans même l'accabler pour ses deux dernières sorties poussives. En revanche, on n'en a sans doute pas fait assez sur ce joueur merveilleux et immanquablement sous-coté qu'est Nando De Colo. Après sa blessure en début de préparation, Vincent Collet l'a utilisé en sortie de banc et son premier match face à l'Allemagne ne laissait pas augurer d'une compétition réussie. C'était méconnaître l'ancien MVP de l'Euroleague. Nando n'a pas laissé l'ego prendre le dessus et a accepté ce rôle de 6e homme. A la manière d'un Manu Ginobili à San Antonio à l'époque, le Nordiste a été absolument formidable et décisif en sortie de banc, finissant la plupart des matches avec un apport crucial au scoring et dans la gestion des possessions.
Avec 16,5 points de moyenne en seulement 23 minutes par match, 54% d'adresse globale, 42% à 3 points et 90% sur la ligne, le nouveau joueur du Fenerbahçe a été magnifique.
Le déclic du French Prince ?
Quel plaisir de voir Frank Ntilikina prendre confiance en lui et jouer libéré ! Sa montée en puissance tout au long du tournoi a été à la fois décisive et enthousiasmante. Il y a encore de la marge, évidemment, et on espère que les Knicks trouveront le moyen de prolonger cette prise de conscience sans lui casser les pattes à coups de DNP ou de miettes de temps de jeu. Après sa très bonne copie contre Team USA, Frank a été le seul à vraiment surnager contre l'Argentine, notamment dans ce secteur offensif où il a temps de mal à trouver de la régularité depuis son départ de Strasbourg. Très prometteur pour la suite !
Patty Mills, éloge de la constance
Il y a deux choses inévitables sur cette terre. La mort, malheureusement, et Patty Mills qui devient Michael Jordan lorsque survient une compétition FIBA. Depuis les Jeux Olympiques 2008, le joueur des Spurs affiche une constance exceptionnelle au scoring et est le moteur de la sélection australienne. On ne va pas se plaindre qu'il n'ait pas décroché de médaille de bronze ou ait fini hors du meilleur cinq de la Coupe du monde, mais on tenait quand même à le saluer.
Plantage à la grecque
La Grèce a quitté la compétition prématurément. A tel point que le débat autour de l'utilisation de Giannis Antetokounmpo semble dater d'il y a 6 mois. C'est pourtant l'une des plus grosses surprises de cette Coupe du monde 2019. Le MVP de la saison écoulée en NBA, véritable cyborg dans la meilleure ligue de la planète, n'a ni brillé, ni été utilisé à bon escient par sa sélection. Les torts semblent partagés, mais on se demande encore comment le coach grec a pu autant négliger d'axer le jeu autour du Freak de Milwaukee, réduisant son champ d'expression. Bien sûr, des joueurs avec infiniment plus d'expérience sous le maillot hellène composaient ce groupe et il fallait les respecter hiérarchiquement. Mais quand même...
Espérons pour les Bucks que cet été décevant n'aura pas entamé la confiance d'Antetokounmpo. Retrouver la NBA et les rênes du jeu devrait être une vraie bouffée d'air pour le All-Star.