Craig Hodges était un marginal lorsqu'il jouait en NBA dans les années 80 et 90. Le shooteur d'élite était en fait très en avance dans la lutte contre la discrimination contre les Afro-Américains et leur manque de représentation dans toutes les strates de la société, la NBA y compris.
L'année dernière, l'ancien joueur des Chicago Bulls, deux fois champion (1991 et 1992) est revenu sur cette époque où il a plusieurs fois tenté d'éveiller les consciences, critiquant notamment le manque d'implication des superstars de la ligue comme Michael Jordan, Magic Johnson, Larry Bird, Isiah Thomas ou Charles Barkley.
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"Jordan a dit que j'étais fou. Magic a dit que ce que je voulais faire était trop extrême"
Dans une interview pour Vlad TV, Hodges a même raconté ce jour où il a tenté de convaincre MJ et Magic de ne pas disputer le Game 1 des Finales 91 entre les Bulls et les Lakers pour marquer le coup.
"Il faut se souvenir du point de vue qui était le mien à l'époque. Il n'y avait pas vraiment de propriétaires, de coaches ou de dirigeants noirs. Je disais encore à Horace Grant récemment qu'à l'époque la moitié des joueurs m'avaient regardé comme si j'avais un troisième œil au milieu du front.
A leurs yeux, ce que je proposais n'avait aucun sens. Ils ne m'ont pas pris au sérieux alors que, pour moi, ça l'était. Est-ce que j'aurais pu boycotter tout seul et sacrifier ce moment ? Tout le monde s'en serait foutu.
J'ai voulu montrer à Michael Jordan qu'il avait le pouvoir de changer les choses, mais il n'a pas pris ça en considération. Je leur ai dit : ''En 1963, Jerry West et Elgin Baylor étaient prêts à boycotter un All-Star Game. C'est grâce à eux que vous avez pu devenir MJ et Magic''.
Michael Jordan a dit que j'étais fou. Magic a dit que ce que je voulais faire était trop extrême."
Craig Hodges s'était montré particulièrement critique envers Michael Jordan au moment de la sortie de The Last Dance. L'ancien arrière avait déploré la manière dont la légende des Bulls avait déblatéré sur d'anciens coéquipiers, mais aussi de ne pas avoir été interrogé par l'équipe de direction du documentaire. Visiblement, il avait pas mal de choses à dire...
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Mais l'activisme de Craig Hodges ne s'était pas arrêté à cette tentative de boycott, après avoir à nouveau remporté le titre NBA avec les Bulls en 1992, il s'était présenté à la Maison Blanche habillé d'une tunique africaine pour la traditionnelle visite des champions en titre au président des USA et avait remis à George Bush une lettre dans laquelle il critiquait la façon dont les minorités étaient traitées aux Etats-Unis et le manque d'implication du gouvernement pour remédier à cela.
Après avoir été coupé par les Bulls, il n’a pas reçu la moindre offre des autres équipes NBA alors qu’il n’avait que 32 ans et qu’il était réputé pour être l’une des plus fines gâchettes à trois-points de la ligue.
« J’avais trouvé cela étrange qu’aucune équipe ne m’appelle pour se renseigner à son sujet », avait-même commenté Phil Jackson.
« D’habitude, quand nous décidons de ne pas resigner un joueur, je reçois au moins un coup de fil. Alors oui, c’est vrai qu’il ne pouvait quasiment pas défendre, mais il y a beaucoup d’autres joueurs dans le même cas et il y en a très peu qui sont capables de shooter d’aussi loin que lui. »
En 1996, Craig Hodges a d’ailleurs intenté un procès pour boycott à la ligue ainsi qu’aux franchises NBA dans lequel il demandait jusqu’à 40 millions de réparation. Ce recours en justice a été jugé irrecevable sous le prétexte que les plaintes pour discrimination raciale avaient une période de prescription de deux ans...
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L'interview intégrale de Craig Hodges
Article initialement publié le 15 juin 2020