Drôle de semaine pour Carmelo Anthony. En deux jours, le néo-vétéran des Trail Blazers a affronté les Knicks puis les Nuggets, ses deux anciennes franchises. Des duels qui font renaître des souvenirs, surtout au moment où la carrière du bonhomme touche à sa fin. Il n’y aura plus beaucoup d’occasions de fêter des retrouvailles. Sans l’opportunité offerte par Portland, Melo serait peut-être déjà à la retraite. Résigné. Aujourd’hui, il savoure l’instant présent. Et se permet de se projeter brièvement dans le futur quand les journalistes lui demandent s’il aimerait que son maillot soit retiré à Denver ou à New York. Deux villes où il a passé la très large majorité de sa vie en tant que basketteur professionnel.
Sans surprise, le joueur de 35 ans rêverait d’être honoré par les deux organisations. Voir son numéro 15 accroché au plafond du Pepsi Center et le 7 à celui du mythique Madison Square Garden. Il est resté mesuré dans ses propos : Anthony a simplement dit qu’il espérait que son maillot soit retiré. Il a des raisons d’y croire. 17 saisons NBA, plus de 1000 matches, 10 fois All-Star, bientôt dans le top-20 des meilleurs marqueurs de tous les temps (actuellement 21e à 300 longueurs de Kevin Garnett), 3 médailles d’Or Olympique, presque 24 points de moyenne en carrière… ce sont des accomplissements dignes des athlètes auxquels les franchises rendent hommage une fois qu’ils rangent leurs sneakers. OK, son maillot mérite d’être retiré mais où ? Denver ? New York ? Les deux ?
Carmelo Anthony a popularisé les Nuggets
C’est peut-être dans le Colorado que ça a le plus de sens. Là où tout a commencé. Carmelo Anthony a débarqué en NBA en 2003, troisième choix de cette fameuse promotion, et il a immédiatement placé Denver sur la carte de la planète basket en compilant 21 points et 6 rebonds pour sa toute première saison dans la plus grande ligue du monde. Il a même contribué à la qualification des Nuggets en playoffs ! LeBron James a été nommé ROY mais Melo aurait lui aussi pu recevoir le trophée. D’ailleurs, à l’époque, il était encore quasiment considéré comme l’égal du King.
Une qualif en playoffs d’emblée puis six autres qui ont suivi. Les pépites de Denver ne sont jamais allées très loin, c’est vrai. Six sorties de route au premier tour et tout de même une finale de Conférence perdue contre les Lakers en 2009. Anthony n’a pas non plus confirmé les énormes attentes placées en lui. Il a cartonné plus que n’importe où ailleurs. Quatre saisons à plus de 25 points, une à 29. Mais seulement trois invitations au All-Star Game. Il était déjà un scoreur incroyable mais 1) sans parvenir à tenir le rythme en playoffs 2) en restant très unidimensionnel.
Malgré ça, on n’arrive pas à imaginer un monde où les dirigeants du Colorado ne rendent pas cet hommage à Melo. Déjà parce que le club n’a pas une Histoire très riche comparé à d’autres équipes NBA. Ensuite parce qu’il a popularisé les Nuggets comme aucun joueur ne l’a fait avant lui.
Quid du 15 de Nikola Jokic ?
Denver aurait d’ailleurs déjà l’intention de retirer le 15. Logique pour l’intéressé. Sauf que voilà, il y a un problème logistique de taille.
https://twitter.com/NBAonTNT/status/1205387536668987392?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1205387536668987392&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.republicworld.com%2Fsports-news%2Fbasketball-news%2Fcarmelo-anthony-wants-denver-nuggets-to-fulfill-his-one-wish.html
« Pour être honnête je pense que c’est ici que mon maillot devrait être retiré. C’est juste mon opinion. Mais bon, Jokic a le 15 aussi maintenant. On verra. »
Et là, vraiment, c’est très mal géré de la part des Nuggets. S’ils avaient l’ambition de retirer le maillot d’Anthony, ce qui semble être le cas, comment ont-ils pu laisser un autre joueur reprendre le 15 ? Nikola Jokic était un « inconnu » au moment où il a été drafté au second tour en 2014. Il s’est pointé dans le Colorado un an plus tard. Un rookie serbe. Et ils l’ont quand même laissé choisir le 15. Juste par jurisprudence, il aurait été préférable de le laisser vacant en attendant de prendre vraiment une décision. Aujourd’hui, deux des meilleurs joueurs de l’Histoire de la franchise porte le même numéro.
Pas très malin. Après, on a eu dans l’exemple d’une organisation qui a retiré deux fois le même maillot. Et c’était d’ailleurs le… 15. C’est à New York. Earl Monroe et Dick McGuire ont tous les deux porté le 15 et ils ont tous les deux été honorés par les Knicks. Les Knicks, venons-en. C’est justement parce que le 15 n’était plus disponible que Melo a choisi le 7 après avoir forcé son transfert de Denver à Manhattan.
Le franchise player d'une sombre époque à New York
Que faut-il retenir de ce passage dans la grosse pomme ? Ce n’est pas tout beau à première vue. Les années sous la domination de Melo, franchise player unique des Knicks, sont perçus comme une période sombre d’une franchise mythique qui se cherche un nouveau souffle depuis le début des années 2000. En 6 saisons et demie à New York, Anthony a mené l’équipe en playoffs à seulement trois reprises. Avec rien de mieux qu’une série perdue au deuxième tour à se mettre sous la dent. C’est pauvre. Surtout qu’il y a juste fait deux très belles saisons individuelles avant de décliner progressivement.
Trop insuffisant pour que son maillot soit retiré. Du moins au premier abord. Maintenant, prenons un peu de recul. Déjà, le meilleur basket de sa carrière, une carrière de futur Hall Of Famer, rappelons-le, Carmelo l’a joué à New York. Il s’est imposé comme l’un des dix meilleurs joueurs NBA là-bas, ce qu’il n’était pas nécessairement à Denver. Il n’a jamais eu un profil all-around, malheureusement, mais il était plus complet aux Knicks qu’aux Nuggets. Même une saison à plus de 4 passes de moyenne. Son record perso. En parlant de record, quel est le joueur qui a marqué le plus de points lors d’un match au Madison Square Garden ? Melo, évidemment. 62 pions. Et ça, ça doit compter dans une enceinte aussi mythique. Cet argument doit peser.
Carmelo Anthony, les Knicks dans son cœur
Il n’a jamais mené les Knicks très loin mais il a toujours su hausser son volume de jeu en playoffs – sans faire gagner donc. Aux Nuggets, sa production baissait après le mois d’avril. Là, c’était l’inverse. Les années Anthony correspondent à une période sombre des Knicks. Mais comparé au marasme dans lequel la franchise glorieuse est plongée aujourd’hui… c’est presque grandiose d’imaginer une formation new-yorkaise à 50 victoires et au second tour des playoffs ! Nombreux sont les supporteurs à se dire que, finalement, ce n’était pas si mal. Même si ça aurait pu être beaucoup mieux.
Après tout, il a été très fort individuellement alors que la franchise était contrôlée par James Dolan. Tout le monde pointe souvent du doigt les agissements clownesques du propriétaire excentrique. Il est considéré comme le premier problème à New York. Et bien Carmelo Anthony a réussi à briller malgré ce chaos total dont il n’est certainement pas le principal responsable.
Les fans des Knicks n’ont aucune occasion de célébrer ou presque. Avant Melo, il faut remonter plus de dix ans en arrière pour retrouver trace de la dernière vraie superstar de l’équipe. Ce serait dommage de les priver d’une rare opportunité de fêter un événement. Surtout qu’en restant fidèle à la franchise malgré les galères, l’ancien All-Star a gagné le respect d’une grande partie des supporteurs. Il est encore apprécié à ‘Big Apple’.
Les Knicks ne retirent que les maillots des légendes qui ont gagné, ou presque, avec donc des critères de sélection exigeants. Il ne rentre peut-être pas dans cette catégorie. Mais il mérite quand même d’avoir son 7 retiré au Madison Square Garden, pour toutes les raisons citées. Après tout, ses années aux Knicks sont celles dont les fans se souviendront quand ils penseront à Carmelo Anthony. Qu’on lui rende hommage, il mérite au moins ça.