Drogué « à son insu », pourrait dire Richard Virenque (référence cyclisme réservé à un public de plus de 30, voire 35, ans). Bon, en réalité, pas tout à fait. Willie Cauley-Stein est un addict. Un ex-addict plutôt. Pendant des années, il pensait prendre des opioïdes – percocet – alors que les pilules qu’il ingurgitait… étaient en fait des fausses. Mais pas dénuées de stupéfiant pour autant. Elles contenaient du fentanyl, substance beaucoup, beaucoup plus puissante. Et donc plus dangereuse. Cent fois plus fort que la morphine et cinquante fois plus fort que l’héroïne. Une seule dose peut tuer.
« Je n’étais pas au courant de ce que je prenais réellement avant de rentrer au centre de désintoxication », raconte l’intéressé au New York Times. « J’ai regardé ma femme et je me suis dit ‘oh mon Dieu’ en repensant à toutes les histoires de ces gamins qui prenaient pour la première fois de la drogue lors d’une fête et mourraient d’une seule dose de fentanyl en pensant prendre des amphétamines. Ils mourraient d’une seule pilule. J’en ai pris des centaines pendant des mois et des années. Je pourrais facilement être mort. Je suis conscient de ce que j’ai esquivé. »
Aujourd’hui posé, guéri, soulagé, l’ancien joueur NBA n’a pas peur de témoigner et de se livrer sur la période noire qu’il a traversé. Ça a commencé alors qu’il était encore pro, notamment après son passage aux Sacramento Kings. Il s’est engagé en 2019 avec les Golden State Warriors, en pleine transition suite au départ de Kevin Durant et à la blessure de Klay Thompson. Mais pendant qu’il se trouvait à San Francisco, trois amis à lui ont été tués dans sa propre maison à Sacramento. Il était censé être avec eux.
« C’est ce qui a provoqué ma chute. Je jouais pour une mauvaise équipe, avec un contrat peu intéressant, ma femme venait de tomber enceinte… il se passait trop de trucs bizarres et il y avait trop de changements dans ma vie alors j’ai commencé à me droguer pour m’échapper du monde réel. »
« Je prenais tellement de pilules, j’étais tout le temps endormi. Et quand j’étais réveillé, je n’étais pas vraiment là. J’ai raté l’occasion de vraiment faire mes adieux à ma grand-mère. J’aurais pu être beaucoup plus présent, faire plus de trucs avec elle sur sa fin de vie. J’ai fait tout l’inverse. J’ai été lâche. »
Le plus fou, c’est que pendant tout ce temps, en plus de ne pas mourir d’un moment à l’autre – les autorités US estiment que 70% des doses de fentanyl saisies sont mortelles – Willie Cauley-Stein a continué à jouer dans la meilleure ligue du monde ! Mais il n’était plus que l’ombre de lui-même.
« L’équipe se rendait compte que je n’avais aucune énergie, aucune passion, aucune personnalité, rien. La drogue m’a tout pris. Je croyais que je jouais dur jusqu’à ce que j’entende des mecs dire ‘il n’aime pas le basket’. Ce n’est que quand je suis redevenu sobre que j’ai réalisé. (…) J’ai appelé mon agent pour lui dire que j’avais besoin d’aide. Je me suis senti soulagé dès le moment où j’ai appelé le programme de la NBA pour leur dire toute la vérité. »
Il est resté plus de deux mois en centre. Depuis, il revit. Passé par l’Italie la saison dernière, où il s’est illustré (quasiment 10 points et 8 rebonds avec Varèse), WCS espère retrouver une franchise NBA. Il n’a finalement « que » 31 ans et ne s’est jamais senti aussi bien depuis son départ de Kentucky, lorsqu’il avait été drafté en sixième position de la draft 2015. La vie lui a donné une deuxième chance et c’est déjà une fin heureuse pour une histoire finalement assez triste. Ce serait beau qu’il puisse rejouer au plus haut niveau, que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis.
Docu Netflix sur 5 grands joueurs NBA : grosse impatience mais petite crainte du tout-scénarisé