Le vrai Stephen Curry est de retour

En-dedans depuis le début des finales NBA, Stephen Curry nous a offert une performance héroïque dont il a le secret au meilleur moment.

Le vrai Stephen Curry est de retour
Stephen Curry est de retour. Discret depuis le début des finales NBA, ses absences ont été - paradoxalement - exposées de plein fouet après la déroute des Golden State Warriors contre les Cleveland Cavaliers dans le Game 3. Le super héros de toute une nation de fans bleu et or boitillait. Un peu comme Christian Bale dans le dernier Batman lorsqu'il arpente les longues allées de sa baraque avec sa canne tel un zombie sans âme jusqu'au jour où il se décide à enfiler à nouveau son costume de chauve-souris blindé et suréquipé. Sauf que Curry n'est pas plus grand ou plus costaud que tous les autres. Il a presque l'allure d'un être humain lambda en comparaison des cyborgs qui peuplent la planète NBA. C'est aussi pour ça qu'il suscite autant d'admiration et... de jalousie naissante. Son succès agace parce qu'il est incompris par une partie des observateurs, notamment les plus anciens qui ont connu la ligue à une époque où le tir à trois-points n'existait pas, autant au sens propre que figuré. [superquote pos="d"]Les super héros ont toujours été observés avec méfiance[/superquote]Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités et attire souvent son lot de détracteurs apeurés par ce même pouvoir. Batman, Spiderman, Iron Man, Hulk. Ils ont tous été accueillis avec un regard méfiant. Les critiques - parfois justifiées - se sont donc empressées de pointer du doigt les limites du double MVP lors des trois premiers matches des finales NBA, dernières marches dans la quête vers le titre et rencontres au cours desquelles les meilleurs joueurs sont attendus au tournant. Pendant plusieurs mois, Curry a marché sur l'eau. Il a fait des miracles, redéfinissant les limites de ce qui était perçu comme possible ou impossible, battant record sur record avant de devenir le premier joueur de l'histoire à être élu MVP à l'unanimité. De quoi enrager quelques vielles légendes en quête d'exposition et de reconnaissance. Et c'est justement quand il a montré des signes de faiblesses - d'humanité finalement - que tous ceux cachés dans l'ombre ont sorti leurs plus belles lames pour poignarder la star. Il y a ceux qui tapent et ceux qui questionnent. Pourquoi n'est-il pas à son meilleur niveau ? Pourquoi est-il moins en vue pendant les finales ? Il a donné aucune réponse en conférence presse. Il a simplement promis son retour. Il a tenu parole. Avec 38 points et 7 des 17 tirs à trois-points inscrits par son équipe - un record NBA de plus - il a guidé ses Warriors vers un troisième succès en quatre manches, rapprochant la franchise d'un deuxième titre consécutif.

Fatigué, diminué, bousculé... il trouve toujours la solution

[caption id="attachment_328077" align="alignleft" width="318"] Stephen Curry a répondu au mal par le mal aux critiques sur son profil de shooteur : 7 tirs primés hier soir.[/caption] Les difficultés de Stephen Curry se résumaient en trois termes simplifiés : physique, mental, adversaire. Habitué à slalomer entre les défenses, à changer de direction en permanence, à alterner les rythmes en une fraction de seconde - autant de mouvements qui mettent les genoux fortement à contribution - le meneur de Golden State n'est parfois qu'une version athlétique basique de lui-même depuis sa blessure au premier tour des playoffs. Un premier prototype sans toutes les avancées technologiques qui font de lui l'un des plus grands joueurs de l'histoire. Curry a été victime d'une entorse au genou il y a moins de deux mois et il est évident qu'il n'est pas en pleine possession de ses moyens même s'il est en mesure de jouer. Il est moins explosif qu'il l'a été en cours de saison. Mais le problème n'est pas seulement physique, il est aussi mental. Il s'est laissé envahir par sa baisse de régime. Il s'est parfois contenté d'être là sans pour autant chercher à dominer dans les trois premiers matches des finales. Il a laissé les Cavaliers essayer de rentrer dans sa tête, à l'image d'un LeBron James le ciblant sur plusieurs possessions, comme pour indiquer à ses coéquipiers que Curry n'est pas un défenseur capable de bloquer son vis-à-vis. Dans le même temps, les joueurs de l'Ohio ont resserré l'étau sur le meilleur joueur adverse. Ils l'ont surveillé de près, l'ont bousculé physiquement et l'ont exposé en défense. [superquote pos="d"]"Il n'a pas la taille ou la puissance pour dominer physiquement. Il le fait avec ses atouts." Steve Kerr[/superquote]Une stratégie préconisée par bon nombre d'ancien grand joueur NBA persuadé qu'un joueur dont le shoot est la principale caractéristique n'est pas capable de faire la différence lorsqu'il est malmené physiquement. Ils ont essayé de changer son jeu mais il a répondu dans le style qui lui est propre. Il a botté l'arrière-train de Cleveland en pulvérisant la défense de loin à coup de tirs primés.
"Il est Stephen Curry. Il n'est pas MVP sans raison. Il n'a pas la taille ou la puissance pour dominer un match physiquement. Il doit dominer avec ses atouts et ce n'est pas toujours facile parce qu'il y a des jours où les tirs ne rentrent pas", explique Steve Kerr.
Ce n'était pas tant un problème d'adresse. Il n'a tout simplement pas assez shooté lors des trois rencontres précédentes. Pas assez frais physiquement pour se mettre dans le rythme et se mettre en confiance. Pas assez relaxé dans sa tête pour se mettre en avant.

Les grands joueurs répondent présents dans les grands moments

[caption id="attachment_328078" align="alignleft" width="318"] Stephen Curry était beaucoup plus impliqué que lors des matches précédents.[/caption] Il n'était pas non plus au meilleur de sa forme physique hier soir. Il a encore une fois contourné ses défenseurs plutôt que de foncer entre les corps comme il avait l'habitude de le faire. Mais son état d'esprit conquérant a eu raison des limites imposées par son genou, sa taille ou sa puissance.
"C'est un grand joueur. On savait qu'il serait agressif. On a fait des erreurs et il nous a fait payer. Il nous a fait payer toutes nos erreurs", lâche LeBron James.
[superquote pos="d"]"Il nous a fait payer toutes nos erreurs." LeBron James[/superquote]Ce n'est pas la première fois qu'il fait taire les critiques. Il a l'habitude de répondre sur le terrain, comme ce fut le cas au tour précédent contre le Oklahoma City Thunder. Il a planté 38 points lors du premier match serré de la série, faisant la différence au meilleur moment alors même que le débat sur sa capacité à briller en finales NBA commençait doucement à s'installer dans la presse.
"Sans ce gars dans mon équipe, je n'aurai pas de bague", conclut Andre Iguodala.
MVP des finales ou pas, victoire aisée ou non, Stephen Curry est le visage d'une équipe des Warriors vainqueurs de 73 matches cette saison et toute proche de décrocher son deuxième titre de suite.