Victor Wembanyama réalise une saison rookie exceptionnelle sur le plan individuel, avec un ratio production/temps passé sur le terrain quasiment jamais vu auparavant, un impact très fort des deux côtés du terrain et des fulgurances qui ne laissent aucune place au doute quant à la réussite de sa carrière. Si on pourrait se dire que cette première année dans la ligue le classe parmi les meilleurs rookies de tous les temps, ce serait oublier un peu vite ce qui s'est passé plus tôt dans la riche histoire de la NBA.
On a listé et classé les 10 joueurs qui, d'après nous, ont été les rookies les plus forts et avec le plus d'accomplissements, depuis la création de la ligue.
10- Wes Unseld (Baltimore, 1968-1969)
Un rookie MVP de saison régulière, ça ne nous viendrait même pas à l’esprit aujourd’hui dans la densité de talents semble importante. En 1969, déjà, c’était un exploit retentissant. Wes Unseld l’a accompli et c’est en partie ce qui nous a poussé à trancher en sa faveur après avoir hésité avec deux autres candidats très méritants.
Elvin Hayes, drafté la même année qu’Unseld - ils seront champions ensemble un peu plus tard - a lui aussi fait un chantier incroyable avec San Diego cette année-là, proposant même des statistiques supérieures à Unseld. Sauf qu’a priori, il était nettement moins populaire auprès de ses pairs.
Walt Bellamy, qui portait le maillot de Chicago en 1962, est le seul rookie dont les stats indécentes se rapprochent de celles de Chamberlain, mais on a pris en considération le contexte et le fait que son équipe, les Packers, affichait tout de même un bilan collectif abyssal en sa présence.
Unseld, pour en revenir à lui, a fait gagner une vingtaine de matches de plus à Baltimore après son arrivée, tout en étant un incontournable de la ligue avec des stats gourmandes (13.8 points, 18.2 rebonds de moyenne).
9- David Robinson (San Antonio, 1989-1990)
Certes, l’Amiral avait déjà 24 ans et quelques joutes contre des adultes dans les pattes à son arrivée en NBA, repoussée de quelques années en raison de sa volonté de servir sous les drapeaux. Mais ça n’enlève rien à la campagne de très, très haut niveau qu’il a réalisée en 1989-1990.
All-Star, membre du troisième cinq All-NBA et du deuxième cinq défensif, Robinson a rapidement marqué les esprits en remettant les Spurs sur la carte. A peine arrivé chez les pros, le militaire guide San Antonio jusqu’en demi-finale des playoffs à l’Ouest, après avoir sweepé les Nuggets (3-0), échouant en 7 matches face aux Blazers, futurs finalistes malheureux.
Cette année-là, tourne à plus de 24 points, 12 rebonds et presque 4 contres de moyenne. Pas si différent de ce que réalise aujourd'hui Victor Wembanyama en NBA, mais sans les résultats collectifs positifs.
8- Michael Jordan (Chicago, 1984-1985)
Le meilleur joueur de tous les temps a commencé son ascension vers les sommets dès ses débuts dans la ligue. C’est une tornade qui a déboulé sur les parquets. Un joueur extrêmement aérien, incroyablement véloce et svelte. Les défenses ont souffert d’entrée. 28 points de moyenne pour le MJ de 21 ans, avec aussi 6 rebonds et 6 passes. De suite un All-Star, bien sûr, mais aussi sixième du vote pour le MVP en plus du trophée de ROY malgré la concurrence (Hakeem Olajuwon, Charles Barkley).
Peut-être encore un peu trop soliste – même s’il a de suite mené les Chicago Bulls en playoffs (avec un bilan négatif) et ce n’était pas gagné à l’époque – pour vraiment être considéré comme le meilleur rookie de l’Histoire. Jojo a eu sa phase d’apprentissage avec quelques échecs encaissés avant de vraiment atteindre les sommets. Mais une fois en haut, il n’a jamais été égalé.
7- Tim Duncan (San Antonio, 1997-1998)
Tim Duncan aurait pu être choisi en premier s’il s’était présenté à la Draft 95. C’est finalement deux ans plus tard, en 97, une fois son cursus terminé et son diplôme en poche, qu’il a débarqué en NBA. Il était sans doute déjà prêt avant, mais ses quatre saisons à la fac lui ont permis d’acquérir la maturité physique et mentale pour dominer dès son entrée chez les pros.
Charles Barkley a même concédé « j’ai vu le futur et il porte le numéro 21 » après avoir affronté Duncan lors de sa saison rookie. Michael Jordan a aussi complimenté le bonhomme, qui a vite fait l’unanimité. Bien qu’associé à un Hall Of Famer comme David Robinson, l’intérieur a posté 21 points, 12 rebonds et 2 blocks par match. Impressionnant. Les Spurs faisaient presque déjà figure de favoris à l’Ouest et ils ont échoué en demi-finales de Conférence contre le Jazz. Un an après, Timmy menait San Antonio à son premier titre en étant sophomore.
6- Elgin Baylor (Minneapolis, 1958-1959)
Encore un rookie qui s’est retrouvé de suite dans la course pour le MVP. Il n’a pas reçu le trophée, qu’il n’a d’ailleurs jamais remporté - dans la lignée de sa légende de loser magnifique, mais Elgin Baylor a tout de même fini troisième du vote, ce qui est exceptionnel en soi. Avec 25 points, 15 rebonds et 4 passes par match dès ses débuts, ça se comprend ! Plus fort encore, il a contribué à mener les Lakers – alors basés à Minneapolis – jusqu’en finales NBA. Pour une défaite en quatre manches contre les Boston Celtics. Tout un symbole de ce que sera sa fabuleuse carrière de roi sans couronne.
5- Larry Bird (Boston, 1979-1980)
Si on retient à juste titre que lors de la saison rookie de Larry Legend c’est son rival Magic Johnson qui a fini par capter la lumière en remportant immédiatement le titre de champion et en étant désigné MVP des Finales, il s’agirait de ne pas oublier à quel point l’entame de carrière du “Hick from French Lick” a été phénoménale.
Après avoir repoussé un peu son arrivée dans la ligue, Bird a pris d’assaut la NBA de son talent de manière immédiate et totale. Finalement, la seule chose qui aura manqué à ce baptême exceptionnel, c’est le titre que Magic a brandi. Lors de l’an 1 de la légende de Larry, Boston a immédiatement été compétitif et c’est un euphémisme, puisque les Celtics ont fini avec le meilleur bilan de la ligue (61-21), grâce aux 21.3 points, 10.4 rebonds et 4.5 passes de moyenne de Bird, élu Rookie of the Year.
Il ne s’en est pas fallu de grand chose pour que Boston affronte les Lakers en Finales NBA, mais les Sixers de Julius Erving, Darryl Dawkins et Maurice Cheeks en ont décidé autrement.
4- Oscar Robertson (1960-1961)
L’ex-roi du triple-double a de suite donné le ton en arrivant en NBA : 30,5 points, 10,1 rebonds et 9,7 passes. Un après, il lâchait sa fameuse saison avec un triple-double de moyenne. « Big O » est l’un des basketteurs les plus complets passés par les parquets américains et il l’a montré très jeune, à 22 ans.
Même si les Cincinnati Royals – ancêtres des Sacramento Kings – n’ont pas fait les playoffs cette année-là, ils ont gagné 14 matches de plus que la saison précédente suite à l’arrivée de Robertson, de loin leur joueur le plus performant. Lui était déjà prêt pour la ligue. L’inverse est sans doute moins vrai vu la manière dont il s’est baladé.
3- Magic Johnson (Los Angeles, 1979-1980)
En atterrissant dans une grosse équipe, Magic Johnson n’a pas vraiment été un rookie comme les autres. Et ça peut le rendre difficile à classer. Jouer aux côtés de Kareem-Abdul-Jabbar (25 et 11), Jamaal Wilkes (20 pts) et surtout Norm Nixon qui était alors meneur (17,6 pts et 7,8 pds), l’a sans doute empêcher de mettre un peu plus de points, de prendre un peu plus de rebonds et surtout de distribuer un peu plus de passes. D’où peut-être une campagne rookie moins impressionnante en termes de chiffres (toute proportion gardée et avec une infinité de guillemets, puisqu’il a aligné 18 pts, 7,7 rbds et 7,3 pds !) que d’autres comme Bird ou Jordan (plus vieux, d’ailleurs).
Mais ce qui l’a pénalisé statistiquement - être dans une grosse équipe - lui a en revanche permis de montrer à quel point il était un rookie hors-norme sur une scène où peu de joueurs peu de joueurs NBA ont pu briller dès leur première année : les Finales. Et là, c’est peu de dire qu’il a assuré quand ça comptait.
Certains auront beau jeu de rappeler que le vrai MVP des Finales aurait dû être Abdul-Jabbar. Pas faux tant il survolait ces playoffs, comme la saison. Mais le fait est que le MVP de la saison régulière s’est blessé, que tout le monde à L.A. s’est mis à flipper et qu’un rookie très bon jusqu’alors a montré qu’il en avait (et pas qu’un peu) sous le capot en claquant un des matches les plus iconiques de l’histoire de notre sport. A seulement 20 piges…
2- Kareem Abdul-Jabbar (Milwaukee, 1969-1970)
Kareem n’était alors “que” Lew Alcindor, mais quel incroyable joueur, déjà ! Les Bucks sortaient d’une saison médiocre lorsque l’alien de UCLA a fait son apparition sur scène pour les propulser vers une saison avec 29 (!) victoires de plus, où ils ont séché les Sixers de Billy Cunningham au 1er tour et échoué vaillamment contre New York en finale de Division.
Sur cette première année en NBA, celui qui allait devenir KAJ en 1971 après sa conversion à l’islam, tournait à 28.8 points, 14.5 rebonds et 4.1 passes de moyenne, préparant le terrain à une saison sophomore encore plus folle, avec le titre de champion NBA à la clé, en compagnie d’Oscar Robertson.
Dans le genre arrivée fracassante dans la meilleure ligue du monde, difficile de faire mieux que le début de carrière de Kareem Abdul-Jabbar. Un avant-goût de ce qui allait être l'une des carrières les plus somptueuses, dominantes et productives de l'histoire de la NBA.
1- Wilt Chamberlain (Philadelphie, 1959-1960)
Oui, la saison rookie de Wilt Chamberlain date d’il y a près de 65 ans. Une époque lointaine où la concurrence était forcément moindre. Mais The Stilt a régné sur cette saison 1959-60 comme aucun joueur de première année n’a régné sur une saison - et comme peu de joueurs de n’importe quel âge l’ont fait. Et contrairement à ce que peuvent penser les aficionados du « c’était des plombiers, ils ne pourraient pas jouer aujourd’hui », le monstre qu’était Chamberlain aurait été encore plus improbable des décennies plus tard, s’il avait bénéficié des techniques ultérieures d’entraînement. Techniquement et athlétiquement.
Ses moyennes cette saison-là donnent le vertige. 37,6 pts, c’est la quatrième marque de l’histoire, les 3 premières étant l’oeuvre de… Chamberlain lui-même bien sûr. Ses 27 rbds sont tout proches des 27,2 qu’il glanera chaque soir la saison suivante et devance ses 25,7 de sa saison 3. Bref, il s’est montré à la hauteur des 50.000 dollars qu’il a touché cette année là (deux fois plus que ce qu’avait payé son proprio pour la franchise des Warriors 7 ans plus tôt…). Les Philadelphia Warriors ont sans surprise fait un énorme bond, passant de la dernière place à des demi-finales de conf perdues 4-2 face aux Celtics.
Sans surprise, et c’est dingue de dire ça, il a aussi chopé le trophée de MVP cette saison-là. Une saison qui aurait pu être la dernière. Soulé par son coach Neil Johnston avec qui l’entente n’était pas bonne, fatigué de prendre des coups (en même temps, comment l’arrêter ?), volonté de revenir vers l’athlé son premier amour ou levier de négociation ? En tout cas, il a annoncé vouloir stopper et tenter de taper le record du monde de décathlon. Il aurait sans doute pu. Mais Johnston s’est fait virer et l’athlé ne rapportait rien. Avec un nouveau contrat de trois et 65K à la clé, il a donc décidé de revenir. La plus grande saison de l’histoire pour un rookie n’aura donc pas été la dernière pour Chamberlain.