C’est l’histoire d’un « petit » qui voulait devenir grand au pays des géants. Fils d’un basketteur américain et d’une maman néerlandaise, Tony Parker, né en Belgique, est… Français. Un paradoxe cocasse qu’il a mis en avant au moment de prononcer ses premiers mots en tant que membre du Hall Of Fame, samedi soir, à Springfield. Un moment unique qui enterre un peu plus la légende de celui qui rêvait de NBA depuis ses débuts ballon en main en Normandie jusqu’à son passage à l’INSEP. Une vingtaine d’années après son départ du Centre fédéral, le voilà officiellement le premier tricolore à intégrer le panthéon du basket. Un pionnier.
Les premiers cassent les codes, brisent des barrières et « construisent des autoroutes » pour reprendre la formule un jour prononcée par Tariq Abul-Wahad pour illustrer l’impact que pouvait avoir le jeune TP sur son sport en France. Autoroute depuis empruntée par Nicolas Batum, Boris Diaw ou encore des dizaines de ses compatriotes jusqu’à Victor Wembanyama, premier joueur français drafté en première position en juin dernier. Peut-être que ce même « Wemby » sera lui à l’origine d’un réseau routier gigantesque.
Mais la vie de pionner représente aussi un fardeau. L’assurance de ne pas être pris au sérieux. « Je voulais rêver grand. Je voulais aller en NBA et je voulais devenir le premier meneur européen à le faire. Je dis toujours à mes enfants de rêver grand. Quand tu expliques ton rêve à quelqu'un et qu'il ne te rit pas au nez, c’est que tu ne rêves pas assez grand. Quand j'étais en France, ils disaient toujours 'oh tu es trop petit, trop maigre, tu n'y arriveras jamais'. Mais celui qui rit aujourd'hui, c'est moi », savoure celui qui a fêté ses 41 ans en mai dernier.
Une histoire, un raisonnement digne d’un conte pour gamins. Mais c’est la sienne. Ou plutôt… c’est comme ça qu’il l’a voit. Parker a effectivement été confronté à de nombreux obstacles sur sa route, de son départ de Paris à son arrivée dans le Texas, à San Antonio, pour rejoindre l’une des meilleures équipes de la ligue en 2001. Il aurait pu ne jamais y mettre les pieds si RC Buford, le GM, n’avait pas insisté pour que Gregg Popovich, coach emblématique mais caractériel, ne lui laisse une seconde chance après un premier essai désastreux. De la haine à l’amour, Pop est devenu « comme un deuxième père. »
Gregg Popovich a détesté Tony Parker à leur première rencontre
Tim Duncan, la star de l’équipe, ne lui a pas adressé la parole tout au long de sa première saison. « Il n’aimait pas mon accent français », plaisante celui qui l’a finalement abreuvé en ballons. Parce que si l’intérieur All-Star, présent au côté de son ancien coéquipier pour l’introduire au Hall Of Fame, ne parlait pas, il savait tout de même comment se faire comprendre.
« Tim Duncan a des supers pouvoirs oculaires. Il ne demandait jamais la balle. Il se contentait de me regarder. Et quand vous avez 19 ans et qu’il vous regarde comme ça, ça fait peur. J’ai eu des coéquipiers qui râlait parce qu’ils ne recevaient pas la balle, genre Bruce Bowen. Duncan ne l’a demandait jamais. J’allais voir Pop pour lui dire que Tim m’avait jeté un regard. Il me répondait que si je voulais encore être le meneur demain j’avais intérêt à annoncer un système pour lui. »
Une anecdote sympathique, une parmi d’autres qui ont nourri le discours de « Tipi » durant ses quinze minutes sur scène. Puis les blagues et les sourires ont laissé place à l’émotion, authentique, au moment où le quadruple champion NBA a remercié ses parents et ses frangins, TJ et Pierre, sa femme, ses enfants puis ses amis. Boris Diaw, Ronny Turiaf, bien sûr, mais aussi Thierry Henry, « son grand frère » qui l’a toujours soutenu, notamment après sa blessure au ménisque en 2017.
Au final, des rires, des larmes, des souvenirs et une soirée historique remplie d’images pour un Tony Parker qui est allé au-delà de ses rêves les plus fous. Un grand pas pour l'homme... et un pas gigantesque pour le basket français.
Le discours complet de Tony Parker au Hall Of Fame
Tony Parker's 2023 @Hoophall induction speech. pic.twitter.com/rZ91U9dWIS
— NBA (@NBA) August 13, 2023