Si dans quelques jours ou semaines, LeBron James raccroche ses sneakers et quitte la scène, on s'excusera sans souci d'avoir été dans l'erreur. Mais comment croire, aujourd'hui, et en connaissant le personnage, que LeBron hésite réellement à poursuivre sa carrière ?
En plus d'être l'un des meilleurs joueurs de l'histoire du basket et un athlète inoxydable, le "King" est un roi de la narration et du contrôle du récit des événements. Il ne fait, ni ne dit jamais rien innocemment. C'est d'ailleurs cette approche qui lui a permis de mener une carrière de 20 ans sans vraie trace de scandale ou de polémique. En lâchant cette phrase en toute fin de conférence de presse après l'élimination des Lakers par les Nuggets en finale de conférence, LeBron savait très bien ce qu'il faisait et ce qu'il provoquerait.
"Je dois réfléchir à beaucoup de choses sur le plan personnel et sur le fait de continuer à avancer dans le basket".
Avec cette formule, ni trop claire, ni trop confuse, la superstar des Lakers s'est assurée plusieurs choses.
L'attention médiatique va rester sur les Lakers et sur lui.
Une forme de pied de nez adressé à Michael Malone et aux Nuggets, qui se sont plaints de leur faible exposition alors que ce sont bien eux les patrons de l'Ouest. Malone a aussi glissé quelques piques sur le favoritisme arbitral et médiatique envers les Lakers et s'il y a bien une chose que LeBron n'aime pas, c'est que l'on sous-entende qu'il est favorisé. Cela va contre la thématique qu'il aime mettre en avant lorsque l'on parle de sa vie, à savoir celle d'un outsider parti du bas de l'échelle pour accéder au sommet et qui surmonté la plus grosse pression de l'histoire pour un lycéen.
On imagine bien LeBron se dire : "Ah, vous trouvez qu'on parle trop de nous ? Ah, vous avez mis la pression sur les arbitres en disant qu'Anthony Davis passait 8 secondes dans la raquette en phase défensive ? Et bien même après nous avoir sweepés, vous n'allez encore pas être le centre d'attention". Aux Etats-Unis, comme en France, ça n'a pas loupé. On a au moins autant parlé du message mystique de LeBron que de la performance des Nuggets.
Puis il y a eu, dans la foulée de son passage dans les médias, un tweet de Chris Haynes indiquant que LeBron hésitait réellement à se présenter à L.A. à la rentrée. Haynes étant le journaliste que les joueurs choisissent le plus fréquemment pour faire passer leurs messages et leurs coups de pression, la manoeuvre semble claire : LeBron fait planer cette menace de retraite pour faire comprendre à Rob Pelinka qu'il doit être agressif pendant l'intersaison et lui bâtir une équipe digne de ce nom. Probablement en accédant à quelques unes de ses requêtes, comme la venue de Kyrie Irving par exemple...
Au niveau de son image, la tactique est aussi pleine de bon sens. Malgré son niveau stratosphérique pour un joueur de 38 ans, LeBron n'est pas exempt de tout reproche. En faisant planer cette incertitude, il s'assure que les gens n'analyseront pas outre mesure les limites - certes discrètes - qu'il est en train de logiquement montrer, mais au fait que "LeBron James est bien trop fort pour prendre sa retraite, célébrons le King et profitons de sa grandeur pendant qu'il est encore temps".
LeBron laisse planer un doute : et s'il disait stop ?
Enfin, et ce n'est pas la moindre des raisons pour lesquelles on ne pense pas que LeBron James va prendre sa retraite, il y a cette histoire qu'il espère construire avec son fils aîné. Dans les médias et sur les réseaux sociaux, LeBron a tranquillement instillé l'idée que son rejeton serait forcément un joueur NBA - à tel point que selon lui il est déjà meilleur que certains joueurs sous contrat - et que l'opportunité de jouer en même temps que lui dans la ligue était son voeu le plus cher.
Le "Chosen One" veut marquer l'histoire de toutes les manières possibles et jouer avec ou contre Bronny serait un nouveau témoignage de son exceptionnelle longévité. La déception doit être grande pour lui à l'heure qu'il est à cause de l'élimination. Mais de là à tirer un trait sur ce rêve ? Bronny a récemment annoncé qu'il jouerait à USC la saison prochaine et sera donc éligible à la Draft 2024. Il serait étonnant qu'aucune franchise ne mise sur lui, que ce soit pour ses qualités bien réelles de basketteur, ou pour des raisons marketing. Son père n'a donc qu'un an à attendre et ce n'est pas comme s'il n'avait plus le niveau pour se projeter aussi loin.
Que les fans de LeBron James et les autres se rassurent. Absolument rien ne va dans le sens d'une retraite ou même d'une volonté de se mettre en retrait. On est sans doute simplement sur une stratégie de l'intéressé, qui opère avec ce même style passif-agressif depuis le début de sa carrière. Force est de constater qu'il lui a très bien réussi jusque-là.