Le Magic de Shaq et Penny, le plus gros gâchis des 90’s

Alors qu’il avait tout pour s’affirmer comme une grande dynastie NBA, le Magic de Shaquille O’Neal a explosé avant même d’avoir vraiment décollé.

Le Magic de Shaq et Penny, le plus gros gâchis des 90’s

Quelle est la dernière équipe à avoir battu les Chicago Bulls AVEC Michael Jordan en playoffs ? La question peut étonner. Parce qu’avec le temps, certains exploits s’oublient. Dans l’inconscient collectif, MJ est l’homme qui ne perd pas. Parce que six finales et autant de titres. Ses échecs, ils remontent à la fin des années 80, quand il se cassait les dents contre les Detroit Pistons et leur défense féroce – c’est un euphémisme. Mais une fois qu’il a trouvé la recette du succès, le « superman » des taureaux est devenu invincible. Ou presque. Une équipe l’a fait tomber à son « prime » (même s’il y a une nuance à apporter). Le Orlando Magic de Shaquille O’Neal et Penny Hardaway.

« On a battu les Bulls de Jordan au second tour. Personne n’a fait ça dans les années 90. Quand je prends les paris, surtout avec des jeunes, au sujet de la dernière équipe à avoir battu Jordan, je gagne de l’argent à chaque fois. Les gens oublient », confiait Shaq à GQ en 2016.

C’était presque vingt ans plus tôt, en 1995. Le Magic commençait à peine son ascension vers les sommets. Parce que la franchise était toute jeune ! C’est seulement en 1988 que la NBA s’est implantée en Floride, d’abord à Miami. Puis à Orlando un an plus tard. Et à ce moment-là, pas d’autres choix que de se construire via la draft. Ça tombe bien, le Magic a touché le jackpot deux années de suite. Deux premiers choix d’affilée. En 1992, pile au moment de l’arrivée chez les pros d’un certain Shaquille O’Neal. Puis en 1993. Les dirigeants voulaient alors sélectionner Chris Webber, superstar NCAA à Michigan, pour former une raquette infernale. Mais ce n’est pas du goût de Shaq, fraîchement élu ROY, qui a un autre prospect en tête.

« J’avais rencontré Penny sur le plateau de Blue Chips. Je l’avais un peu testé. Du coup, quand je suis rentré, j’ai discuté avec le GM. Je lui ai dit : je sais qu’on a le premier choix de draft, et je sais que vous voulez Chris Webber mais je reviens juste de jouer avec ce gars, Penny Hardaway, et c’est lui qu’il nous faut. J’ai mis un petit coup de pression en parlant de ma fin de contrat qui arrivait dans deux ans, s’il ne le prenait pas… »

 

 

Le Magic de Shaq et Penny, plus fort que les Bulls de Jordan

Le message est passé. Enfin, presque. Orlando a quand même pioché Webber avec son premier choix. Et Shaq était parti pour tout casser dans sa propre baraque… avant de comprendre que le Magic a en réalité drafté l’intérieur pour l’échanger aux Warriors contre Penny Hardaway. La naissance d’un duo… magique. Deux jeunes superstars complémentaires. Un meneur flamboyant, athlétique, explosif et un intérieur surpuissant, agile et vif. « C’était parfait. C’était le remix du duo Magic Johnson – Kareem Abdul-Jabbar ! », notait le géant. Malgré leur inexpérience, les deux compères mènent alors leur équipe en playoffs. Un premier coup d’essai et une balayette, 0-4, contre les Indiana Pacers de Reggie Miller. Mais peu importe, il y a le temps.

Vient donc cette fameuse saison 94-95. Jordan n’est plus là. Il a pris sa (première) retraite et la route semble dégagée pour une nouvelle dynastie. Surtout que les Houston Rockets, champions en titre, sont en difficultés pendant la saison régulière. Orlando est devenu une place forte à l’Est. Horace Grant, pilier des Bulls, a rejoint O’Neal et Hardaway. Nick Anderson et Dennis Scott sont les deux gâchettes qui complètent le cinq majeur. Un groupe vraiment solide. Et même plus solide que celui de Chicago… pourtant renforcé par le retour du numéro 23. Enfin du numéro 45. De Jojo, quoi.

 

Quelques semaines avant les playoffs, le triple champion NBA annonce son retour au basket après un passage éphémère au baseball. Il n’a évidemment plus la même confiance. Il est brillant, mais un peu rouillé. Et le Magic en profite. Malgré 38 points de Jordan dans le Game 2, 40 dans le Game 3 et 39 dans le Game 5, les Floridiens se qualifient pour les finales à l’Est en l’emportant en six manches (4-2). Ils se hisseront même jusqu’en finales. Pour y retrouver les Rockets, impitoyables et surprenants pendant les playoffs. Mais même avec Hakeem Olajuwon en face, Shaq et Penny se sentent favoris.

« Nous étions trop sûrs de nous », reconnait le meneur fantasque.

 

Grande équipe partie trop tôt

Le Game 1 pouvait leur donner raison. Le Magic menait de trois points dans les derniers instants. Puis Anderson a raté non pas, non pas deux, non pas trois mais quatre lancers de suite. Houston a arraché la prolongation. Avant de l’emporter. Le crève-cœur. Les joueurs de Brian Hill ne s’en remettront pas. Ils sont ensuite balayés, encore, 4-0. La frustration commence à monter. Mais après tout, Shaquille O’Neal n’a que 22 ans et Penny Hardaway en a 23. Encore une fois, il y a le temps.

L’équipe était programmée pour dominer à un moment ou à un autre. Peut-être dès 1996 ? 62 victoires en saison régulière… et toujours 10 de moins que les Bulls. Invincibles, ou presque, les troupes de la « Windy City » sont menés par un Michael Jordan revenu au sommet de son art. Et il veut prendre sa revanche. Ça tombe bien, Orlando et Chicago se retrouvent en finales de Conférence à l’Est. Pour un nouveau duel serré ? Pas vraiment. 4-0. Un troisième coup de balais consécutif.

C’est trop. Trop pour Shaq, qui craque. Surtout que le Magic ne lui propose même pas le maximum alors que le pivot All-Star est free agent. Quelle erreur. Vexé, O’Neal cède aux avances de Jerry West et prend la direction de Los Angeles. Penny se retrouve esseulé. Peut-être submergé par autant de pression, la jeune star a alors enchaîné les blessures.

Jordan et les Bulls ont gagné trois titres de plus, en 96, 97 et 98. Mais après ça, il y avait le champ libre… pour les Lakers de Shaquille O’Neal et Kobe Bryant. Une autre dynastie. Bien plus à l’Ouest. Avec le recul, Shaq avouera qu’il est parti trop tôt d’Orlando. Le Magic allait finir par passer ce cap. Les défaites étaient nécessaires. Mais il avait la place pour réussir quelque chose de grand.