« Pourquoi j’ai supprimé les réseaux sociaux ? Parce que c’est une perte de temps », a éludé Nikola Jokic en conférence de presse, après sa victoire face aux Lakers dans la nuit de lundi à mardi. Sa réponse désinvolte n’étonne pas, le personnage est bien connu et apprécié tel quel. D’un naturel parfois déconcertant, le leader des Nuggets est toujours resté fidèle à lui-même.
Il est possible que le Serbe soit le double MVP qui s’admire le moins — bien que Tim Duncan ait sans doute son mot à dire dans cette discussion. Ses déclarations modérées ne sont pas très vendeuses. Sa vie en dehors du terrain n’a rien de fascinant pour les tabloïds. Et il serait bien le dernier à se retrouver en tendances Twitter après un clash ou pour ses burner accounts. Jokic ne force pas le trait et ne s’intéresse pas à grand-chose d’autre qu’à la balle orange et ses chevaux.
« Ce que j’aime le plus chez Nikola, outre son jeu exceptionnel et sa régularité, c’est qu’il n’a jamais changé », a souligné Michael Malone, son coach. « Le succès, l’argent, la célébrité n’ont jamais changé ce type et c’est rare dans ce milieu. »
Étendards de cette attache à ses racines, il garde toujours ses deux grands frères près de lui. Strahinja et Nemanja, qui ont tous les deux joué au basket à un certain niveau, célèbrent les moments importants avec le reste de l’équipe comme s’il s’agissait de leurs propres victoires.
THIS MOMENT pic.twitter.com/qGTqgt94VJ
— Denver Nuggets (@nuggets) May 23, 2023
Nikola Jokic : un triple-double de moyenne historique en playoffs
« Personne n’aurait pu imaginer qu’il devienne double MVP »
Contrairement à la plupart des franchise players, le natif de Sombor, en Serbie, n’a pas eu le droit au tapis rouge à son arrivée dans la ligue. Sa sélection en 41e position de la draft 2014 a au contraire été éclipsée par une pub pour Taco Bell, un an avant son premier match.
Lors de celui-ci, il a passé moins de quatre minutes sur le terrain, en tant que remplaçant du Français Joffrey Lauvergne, transféré à la fin de l’exercice. Avec 25 de ses 80 rencontres sur le banc pour sa première année, il n’était pas le centre du projet. Personne n’aurait pu prédire qu’il ferait une telle carrière, pas même les fans les plus enthousiastes.
« Je pense toujours à cela et j’en ris, parce que lors de la première Summer League à Vegas, il pesait 135 kg. Il était hors de forme », a rappelé Malone ce mardi. « Personne — et si quelqu’un vous dit le contraire, c’est qu’il raconte n’importe quoi — n’aurait pu imaginer qu’il deviendrait double MVP, dépassant Wilt Chamberlain tous les deux jours. Cela témoigne de son dévouement à son jeu, (notamment) pour être en excellente forme, et du fait qu’il a compris que pour réaliser son potentiel, il devait travailler plus dur. »
LeBron James encense les Nuggets et Nikola Jokic
Nikola Jokic semble ne jamais avoir perdu cela de vue et fait preuve d’une humilité rare pour un joueur de son standing. On l’entend rarement critiquer ses coéquipiers et s’inclue dans un « nous » général quand il le fait. Il entretient la même forme de respect pour ses adversaires. « Il n’y a pas de place pour la jalousie. […] Je suis bon avec tout le monde, je n’ai pas d’ennemis et je ne pense pas avoir d’ego », avait-il assuré dans une interview pour Arena Sport TV en janvier.
Nikola Jokic laisse le jeu venir à lui
Après cinq étoiles de All-Star consécutives, deux trophées de MVP et le plus gros contrat de l’histoire de la NBA (272 M$/5 ans), le pivot garde les pieds sur terre. Il reste l’un des joueurs les plus altruistes de la ligue et, comme en dehors du terrain, ne force rien.
« Les meilleurs joueurs prennent généralement le plus de tirs. Quant à moi, je prends toujours ce que le jeu me donne », avait-il expliqué au début de l'année. « J’aime montrer que marquer n’est pas la chose la plus importante et que l’on peut impacter le jeu de différentes manières. »
Il peut, d’une certaine manière, apparaître comme l’antithèse de Carmelo Anthony, autre visage des Nuggets, qui a annoncé sa retraite lundi. Les deux partagent un talent formidable, mais l’ailier a toujours été accusé d’individualisme, tandis que Jokic laisse davantage le jeu venir à lui. Il est le symbole d’une nouvelle ère à Denver, construite sur une continuité et une philosophie collective qui lui correspondent à merveille.
L’époque où Nikola Jokic était un 41e choix de draft hors de forme aligné derrière Joffrey Lauvergne semble aujourd’hui très loin. Il est devenu le cœur d’une équipe qui s’apprête à disputer les premières Finales NBA de son histoire, tout en restant fidèle à lui-même. Celui qu’il était déjà huit ans plus tôt suffit amplement à incarner la franchise du Colorado.
« J’aime Nikola. J’aime ce qu’il est en tant qu’homme, en tant que mari, en tant que père », a conclu Michael Malone. « C’est un excellent représentant de notre organisation. »