Sean Marks a fait un rêve. Et il a fait de son rêve un cauchemar. L’ancien membre des San Antonio Spurs, sacré avec la franchise texane à deux reprises, une fois en tant que joueur et une fois en tant qu’entraîneur, a accepté un poste pourtant pourri aux yeux de tous : celui de GM des Brooklyn Nets en 2016. L’équipe new-yorkaise sortait (déjà) d’un épisode dramatique après avoir hypothéqué (déjà) tout son avenir en sacrifiant (déjà) tous ses tours de draft pour des stars vieillissantes. Avec une toute petite série de playoffs gagnée à la clé.
Pas d’espace sous le Cap, pas de picks et une équipe pas assez forte pour viser le titre… la mission paraissait très délicate pour quiconque oserait essayer de relever les Nets. Mais Marks y a cru. Un peu comme dans les films où tout le monde voit une baraque ou une voiture dégueulasse, tout le monde sauf un type, émerveillé, qui sent le potentiel du bien. Il voulait un poste dans un front office et c’est tout ce qui importait.
Et il s’est mis à la tâche. Le dirigeant a fait le boulot. Il a su construire une équipe jeune, solide, prometteuse. Avec D’Angelo Russell, Jarrett Allen ou encore Caris LeVert. Lui et Kenny Atkinson ont instauré des codes. Des valeurs. Ils ont créé une identité à une franchise qui n’en avait plus depuis longtemps.
Le genre de projet qui attire les stars. Sean Marks s’est pris au jeu. Bâtir de rien, c’est sympa. Mais ça reste un compétiteur et le but est de gagner. Gagner gros. Pour aller loin, pour viser grand, il faut des superstars. Il en voulait une. LA superstar. Kevin Durant. Le meilleur joueur de la ligue en 2019. Sauf que KD ne venait pas seul. Il emmenait en plus son ami Kyrie Irving dans ses bagages. Soudainement, les Nets se sont retrouvés avec deux des plus grands talents du circuit et avec la pression de chercher enfin une bague.
C’est parti en vrille très vite, même si Marks et les Nets ont préféré fermer les yeux sur les signes avant-coureurs. Durant et Irving ont refusé à se plier à certaines des règles mises en place pendant la reconstruction du groupe. Ils ont poussé Atkinson, l’un des plus gros cerveaux de cette ligue, à bout. Ils ont poussé pour rameuter James Harden. Brooklyn y a sacrifié quasiment tous ses choix de draft dans l’affaire.
Un an après, le barbu quittait déjà la grosse pomme, exaspéré. Kyrie a essayé de se faire la malle mais personne n’en a voulu l’été dernier. Durant a demandé son transfert. Deux fois. En vain. Il a aussi réclamé la tête de Steve Nash. Le coach a fini par être licencié quelques semaines après le début de la saison. Puis c’est Irving qui a fini par planter tout le monde en réclamant son départ alors que l’équipe tournait bien. Il a obtenu gain de cause lundi. Trois jours après, KD filait donc aux Phoenix Suns.
Kevin Durant, les coulisses d’un MEGA deal
Quel gâchis. Terrible gâchis. Kevin Durant, James Harden et Kyrie Irving ont joué 16 matches ensemble. Ils en ont gagné 13. Ils sont peut-être passés à une pointure (celle de KD sur son panier contre les Milwaukee Bucks en 2021) du titre. Mais au final, le bilan est tellement pauvre : 7 matches de playoffs gagnés. Une petite série remportée. Deux sweeps au premier tour. Et une organisation à nouveau en chantier.
Peut-être que les Nets ont craqué trop tôt et évidemment trop souvent. Ils ont lâché Harden en cours de saison pour Ben Simmons l’an dernier. Ce trade, il aurait probablement été toujours sur la table quatre mois après. Ça aurait au moins pu permettre, même dans la mauvaise humeur, à Brooklyn de tenter une fois de plus sa chance en playoffs avec son « Big 3 ». Les succès peuvent panser de nombreuses plaies. Peut-être que Durant et Irving n’auraient jamais demandé leur transfert par la suite. Peut-être qu’Harden se serait ravisé. Dans le pire des cas, les Philadelphia Sixers tenaient tellement à l’ancien MVP qu’ils auraient sans doute cédé les mêmes atouts en juillet.
Pareil pour Kevin Durant. Pourquoi maintenant ? Qui pense réellement que les Suns ne proposent pas exactement la même chose – sans Jae Crowder – dans quatre mois ? Pourquoi faire ce cadeau à la star alors qu’il a tout de même contribué à foutre en l’air les plans de la franchise ? Pourquoi ne pas essayer une campagne de plus ?
Peut-être que Marks et les Nets étaient fatigués. Déterminés à tourner la page la plus gênante de l’Histoire d’une franchise pourtant chargée en périodes sombres. C’est un fiasco monumental. Et pourtant, l’organisation se retrouve tout de même dans une position intrigante. Presque excitante même. Une position plus abordable que celle dans laquelle végétait l’équipe quand il a pris sa tête.
Avec Cam Thomas, Cam Johnson, Mikal Bridges, Nic Claxton ou encore Ben Simmons, les Nets ont plusieurs joueurs au potentiel encore inexploité. Ils ne possèdent pas tous leurs picks mais ils ont récupéré ceux des Suns. La plupart des contrats de l’effectif représentent aussi des atouts sur le marché. Bref, la lumière est déjà entrevue au bout du tunnel.