Marshall Henderson, la tête brûlée signée par les Kings

Signé par les Sacramento Kings pour le training camp, Marshall Henderson a une chance de réaliser son rêve de NBA, après un parcours totalement dingue.

Marshall Henderson, la tête brûlée signée par les Kings
Déjà bien lotis en fortes têtes, les Sacramento Kings ont invité un sacré cas, à leur training camp, Marshall Henderson. Il y a quelques mois, dans REVERSE #51, nous vous présentions ce joueur à l'histoire mouvementé :

Marsh Madness

Des highlights NCAA au championnat iraquien, le parcours de Marshall Henderson est aussi dingue que lui. Par Théophile Haumesser Un vocabulaire à mériter de se faire laver la bouche au savon par Ma Dalton, un talent et des capacités qui lui ont permis de se démarquer encore plus que par sa couleur de peau dans un milieu largement dominé par des stars noires, une attitude qui pourrait se résumer en ces cinq petits mots « I don’t give a fuck » et qui l’a poussé à plusieurs reprises à enfreindre allègrement les limites imposées par le politiquement correct, un penchant avéré pour les substances illicites, et un prénom d’ampli pour guitare : Marshall. Ça peut prêter à confusion, pourtant il ne s’agit pas d’un rappeur multimillionnaire originaire de Detroit mais d’un basketteur qui jouait cette saison en Iraq. Avant même de se faire remarquer en NCAA par ses shoots longue distance et sa façon d’aller se planter face aux tribunes des fans les plus hostiles pour leur brandir sous les yeux le maillot de Mississipi – comme une façon à peine détournée de leur crier « Dis mon nom, maintenant ! » -, Marshall Henderson était habitué à être au centre des polémiques.

Cocaïne, marijuana et faux billets

En guerre constante avec son père qui avait eu la mauvaise idée de vouloir le coacher au lycée, il a rapidement cherché à s’évader, au sens propre comme au figuré, disparaissant de la maison sans donner d’adresse ou en s’adonnant à diverses drogues et à l’alcool. « Je pouvais planter 25 points, mais mon père essayait toujours de trouver quelque chose pour me critiquer », a-t-il confié à Andy Katz d’ESPN en 2013. Du coup, alors que des facs comme Gonzaga, Notre Dame ou Stanford s’intéressaient à lui, il a trouvé le moyen de se faire arrêter en tentant d’acheter pour 800 dollars de marijuana… avec des faux billets. Normalement, quand le FBI vient frapper à votre porte pour vous accuser de contrefaçon, ça vous incite à faire attention. Mais pour Marsh, la prudence est une notion encore plus vague que la pudeur pour les Kardashian. Résultat, un dépistage positif à l’alcool, à la marijuana et à la cocaïne alors qu’il était toujours en période de mise à l’épreuve qui, au final, lui a valu de passer 25 jours à l’ombre. Pas vraiment le scénario idéal quand on rêve de rejoindre la grande ligue. D’autant que, dans le même temps, son parcours scolaire a déraillé tout aussi sévèrement. Une saison freshman intéressante à Utah (11,8 pts, 2,5 rbds) suivie d’un transfert et d’une saison red shirt à Texas Tech, puis d’un nouveau départ cette fois pour le Junior College de South Plain après que le coach texan se soit fait virer. [superquote pos="d"]« Ça fait mal d’avoir été si proche de pouvoir réaliser mon rêve et de penser que quelques mauvais choix m’en ont empêché. »[/superquote]Bien trop talentueux pour le niveau JuCo mais toujours empêtré dans ses problèmes personnels, c’est finalement l’université de Mississipi qui lui propose de rejoindre à nouveau la Division 1 pour son année junior. « Ils m’ont dit qu’ici je pourrais repartir de zéro. » Ce choix reste à ce jour l’un des plus judicieux de sa vie, car c’est durant l’exercice 2012-13 qu’est né le « phénomène Henderson ». Non seulement il a pu mener les Rebels au titre de la Conférence SEC, mais en prime il a planté certains des plus gros shoots de la saison (notamment celui complètement dingue de l’égalisation pour battre Vanderbilt en prolongation) tout en fermant la bouche de supporteurs adverses déchaînés. « Faire taire des salles de 20 000 personnes, c’est la chose que je préfère au monde. » Avec une participation au tournoi NCAA et un trophée de MVP du tournoi SEC (20 pts en moyenne et 35% de réussite à 3-pts), forcément, les scouts ont commencé à s’intéresser de près à ce shooteur survolté. « J’ai pu me faire des contacts NBA et certains rappeurs faisaient même des commentaires à mon sujet. Je me disais ‘‘C’est cool’’ », a-t-il récemment expliqué à Marc J. Spears de yahoo.com. C’est malheureusement là que tout a de nouveau dérapé.

Le nouveau Khalife de Bagdad

Arrêté en possession de beuh et de cocaïne durant l’intersaison, il a dû entamer sa saison senior par une suspension de trois matches. Derrière, il n’a jamais réussi à confirmer sa montée en puissance et un nouveau scandale causé par des tweets jugés homophobes suite à la draft de Michael Sam (le premier joueur universitaire de Foot US ouvertement gay) a fini d’enterrer ses espoirs d’être drafté. « Ça fait mal d’avoir été si proche de pouvoir réaliser mon rêve et de penser que quelques mauvais choix m’en ont empêché », regrette-t-il. Malgré tout, il aspirait toujours à passer pro. Le problème, c’est que personne ne voulait plus prendre le moindre risque avec lui. Après un essai avec l’équipe de D-League des Rockets et un bref contact avec celle des Kings, plus rien, pas même en Europe. Il aura bien réussi à décrocher quelques workouts et des piges en Italie, mais c’est finalement au Qatar qu’il a pu débuter sa carrière professionnelle avant de rejoindre le club de Nift Al-Janoub de… Bagdad ! Une destination totalement improbable vue la situation actuelle en Iraq et le fait que quasiment personne ne sait qu’il y existe un championnat, mais les 10 000 dollars de salaire mensuel qui lui ont été proposés l’ont finalement convaincu de tenter le coup. « Si tu es Américain, que tu scores et que tu fais gagner leur équipe, les proprios de ces clubs-là font ce qu’il faut pour que tu sois heureux. » Quand même, pas simple d’être serein en vivant dans la crainte d’attentats à la voiture piégée. « Je discutais avec des joueurs US d’un autre club et ils ont dû changer d’hôtel parce qu’une explosion a démoli la moitié du bâtiment », se souvient-il. « Sur l’une des photos qu’ils m’ont montrées, la chambre en face de la leur avait été totalement détruite. » Malgré tout, Marshall Henderson est allé au bout de son contrat et espère maintenant pouvoir enfin tenter sa chance en NBA. Mais surtout, il est peut-être en voie de gagner le match le plus important, celui contre lui-même. « Le vrai test, ça va être de rentrer chez moi en ayant des milliers de dollars en poche. Qu’est-ce que je vais faire avec tout ça ? », se demande-t-il. « C’est dur à dire tant que je ne suis pas dans cette situation, donc on verra. » La partie n’est pas encore terminée.