Memphis, loin d'être qu'un feu de paille
"Oui, Memphis réalise un bon départ, mais ça ne va pas durer", cet argument pourrait revenir pour réfuter l'idée d'un Marc Gasol MVP, mais il n'est pas fondé. Évidemment, on va tout de suite éliminer les hypothèses comprenant une blessure, les Grizzlies ont démontré l'an dernier qu'ils étaient, plus que certaines franchises, dépendants de leurs stars et une absence prolongée d'un Zach Randolph ou encore d'un Mike Conley pourrait mettre à mal les bonnes performances de l'équipe. Néanmoins, pour le moment, à part une mauvaise gastro, rien ne semble perturber la bonne série des Grizzlies. Si on insiste sur la bonne santé de l'intégralité de l'effectif (et surtout des cadres), c'est que cette donnée va se démontrer très importante dans notre développement. En effet, comme vous le savez, Memphis a été privé de Marc Gasol (et même de Randolph dans une moindre mesure) sur une partie de la dernière saison et c'est grâce à un ultime rush au grand complet sur la fin de saison que la formation est parvenue à accrocher les playoffs. Pourquoi évoquer la fin du dernier exercice ? Parce que sur le calendrier de la saison 2014 (à partir de janvier 2014 donc), les Memphis Grizzlies disposent du meilleur bilan de la NBA devant les San Antonio Spurs, les Los Angeles Clippers et les Houston Rockets. En effet, les hommes de Dave Joerger affichent sur cette année 2014 un bilan de 49 victoires pour 17 défaites, les chiffres parlent d'eux-mêmes. [superquote pos="d"]Les Grizzlies, meilleur bilan sur l'année 2014 : 49 victoires - 17 défaites.[/superquote]Évidemment, jouer pour Memphis n'est pas qu'un avantage pour Marc Gasol, il y a aussi de nombreux inconvénients. Car malgré les bons résultats de la franchise, c'est un tout petit marché et il faut être honnête, le Tennessee ça ne fait pas vraiment rêver, tout comme le jeu des Grizzlies. En effet, l'intérieur espagnol souffre d'un manque d'exposition, même s'il est considéré par certains comme l'un des meilleurs pivots de la NBA, il ne revient pas souvent dans les discussions pour ce fameux titre de MVP, il faut avouer que des joueurs comme Stephen Curry, Anthony Davis ou encore James Harden sont bien plus "sexy" que lui. Car à la différence de ses principaux concurrents, il est difficile de quantifier son impact ou encore d'isoler ses "plus belles actions", il effectue principalement le travail de l'ombre et ses statistiques ne sont pas forcément révélatrices de son apport. Dans la NBA actuelle, les statistiques individuelles (points, rebonds, passes, mais aussi PER) sont de plus en plus scrutées, analysées et mises en valeur au détriment de l'impact "invisible". Car, par exemple, si Marc Gasol ne prend "que" 8,1 rebonds par match, c'est aussi parce que son équipe est celle en NBA qui autorise le moins de shoot aux autres franchises, cette donnée ne doit-elle pas être prise en compte ? Vous l'aurez compris, de nombreux obstacles vont compliquer la tâche du joueur de 29 ans dans cette course pour le titre de MVP, mais il peut faire la différence et tenir sur le long terme.Marc Gasol, une transformation évidente
Si vous avez regardé un match des Grizzlies cette saison, vous n'avez sûrement pas pris votre pied - sauf le buzzer beater de Courtney Lee - car le jeu développé n'est pas vraiment spectaculaire, ça ne repose pas sur des grandes envolées ou des différences individuelles, c'est un jeu simple mais diablement efficace, à l'image de l'intérieur ibérique. Mais plus que les systèmes des Grizzlies, il est intéressant d'analyser le "nouveau" Marc Gasol. Comme on l'avait déjà remarqué lors de la Coupe du Monde, le pivot a suivi un régime lors de l'intersaison et il est particulièrement affuté. Cette différence physique majeure a bien évidemment un impact sur le jeu du petit frère de Pau Gasol, il est plus actif, plus véloce et il gêne considérablement ses adversaires par sa mobilité, son match cette nuit contre DeAndre Jordan en est d'ailleurs le parfait exemple (30 points, 12 rebonds). Contre les Californiens, il a utilisé toute les armes de sa panoplie offensive et notamment son jumper à mi-distance. Après la rencontre, le pivot a d'ailleurs insisté sur l'importance de cette fiabilité dans cette zone :"Quand je commence à réussir à mi-distance, les défenseurs sont obligés de sortir sur moi. En plus, ça permet de créer des situations pour les autres et je suis vraiment heureux de ça", a commenté Marc Gasol pour ESPN.Pourtant, la différence sur ce début de saison ne réside pas vraiment dans son adresse (50% de réussite), la clé, c'est son agressivité. En effet, Marc Gasol est bien plus impliqué dans le jeu de son équipe offensivement et il a bien plus de responsabilités cette saison. Les chiffres sont assez édifiants : sur le début de sa carrière NBA (2008-2014), il tentait 10,6 tirs et il effectuait 4,4 lancer-francs par match ; cette saison (2014-2015), il tourne à 14,3 tirs et 6,7 lancer-francs par match. Comme le souligne très bien ce comparatif, l'intérieur est plus présent en attaque sur les ordres de Dave Joerger. Un nouvel état d'esprit salué par son partenaire, Mike Conley :
"Dans ma tête, il ne fait aucun doute que Marc va être agressif. Quand tu commences la saison à 12-2, on va lui dire de continuer de mettre 30 points par soir."[superquote pos="d"]"Marc va être agressif. On va lui dire de continuer de mettre 30 points", Mike Conley.[/superquote]C'est aussi l'une des nouveautés pour Marc Gasol, il est devenu un scoreur redoutable et il est le principal artisan des progrès des Grizzlies en attaque (comme indiqué plus haut, 6ème meilleur attaque de la ligue). Dés le premier match de la saison, il a annoncé la couleur en réalisant son record en carrière en inscrivant 32 points, et le plus impressionnant, c'est qu'il semble capable de rééditer ce genre de performance. En effet, sur les deux derniers matchs, il a réussi à marquer plus de 30 points (30 et 32). Il faut vraiment se rendre compte que cette série annonce un véritable tournant dans la carrière de Marc Gasol, il a ainsi atteint 3 fois la barre des 30 points lors de cet exercice 2014-2015 en 14 matches, il ne l'avait fait qu'une fois en 436 avant cette saison. Le plus fort dans tout ça, il semble avoir un mental tout simplement monstrueux à l'approche malgré les bonnes performances de sa franchise. Au terme de la démonstration des Grizzlies cette nuit face aux Clippers, voici sa première déclaration (petit rappel, son équipe est première de la conférence Ouest avec 12 victoires et elle vient de gagner 107 à 91 contre l'un des favoris pour le titre) :
"On ne peut pas être satisfait, on doit vraiment continuer à être plus exigeant parce que c'est comme ça qu'on doit avancer dans la vie et dans ce sport. On doit s'inquiéter pour le jour suivant", a lâché Marc Gasol.Transformé physiquement, agressif dans son jeu, lucide mentalement et pilier de la meilleure équipe de la ligue, Marc Gasol dispose de toutes les qualités nécessaires pour être MVP. Mais comme vous l'avez compris, il est de loin le candidat le moins sexy pour ce titre et il doit s'imposer comme une évidence pour rafler la mise. Puis peu importe ce trophée (est-ce que ça l’intéresse vraiment ?), une chose est sûre, l'intérieur des Memphis Grizzlies est encore bien trop sous-estimé dans cette ligue et il est l'un des meilleurs pivots de la NBA, mais lui, il n'est pas dans la lumière, il n'est pas une machine à highlights ou à statistiques, non, son talent c'est de rendre ses partenaires meilleurs. Ce n'est pas à ça qu'on reconnait les plus grands ?