L’œil de Yacine Aouadi : «La Serbie est l’outsider de la finale »

Avant la finale de la Coupe du monde 2023, on dissèque l’opposition entre l’Allemagne et la Serbie avec le technicien Yacine Aouadi.

L’œil de Yacine Aouadi : «La Serbie est l’outsider de la finale »

Figure de proue du coaching français, Yacine Aouadi est considéré comme l’un des pionniers du développement individuel en France. Il a travaillé avec de nombreux joueurs de haut niveau, œuvré en tant que chargé du développement au CSP Limoges et créé le camp UPSILON, un camp de développement unique à destination des joueurs professionnels. Yacine est une pointure dans son domaine, ce qui explique en partie pourquoi il est devenu le deuxième entraîneur individuel, et le premier français, à signer avec Puma, après Chris Brickley — qui a travaillé avec LeBron James ou Kevin Durant.

Voilà pourquoi nous voulions faire appel à son œil expert avant la finale de la Coupe du monde, entre l’Allemagne et la Serbie, prévue ce dimanche à 14h40.

BasketSession : À ce niveau de compétition, avec deux équipes très équilibrées, qu’est-ce qui fera la différence ?

Yacine Aouadi : Pour moi, la Serbie est l’outsider de la finale. Pourquoi ? Tout simplement parce que les Allemands viennent de sortir les Américains, les favoris, en faisant un match énorme.

Les chiffres parlent plutôt en faveur de la Serbie. Ils ont des arrières très agressifs, capables de tirer et de finir. On peut citer Bogdan Bogdanovic, Marko Guduric et Stefan Jovic… Ils sont tous très dangereux. Ils ont une raquette solide, avec Nikola Milutinov qui a été énorme lors des phases finales, toujours très juste dans son jeu. Et il ne faut pas oublier que les Serbes courent beaucoup et jouent plus de possessions que les Allemands. Ils marquent quand même 20 points de moyenne entre la contre-attaque et la transition.

L’Allemagne peut rivaliser avec le secteur intérieur serbe. Il y a aussi des joueurs talentueux à l’extérieur. En dehors de Dennis Schröder, il y a Andreas Obst, qui a été létal contre les États-Unis. L’équipe est également assez présente aux rebonds offensifs, ce qui peut être une arme contre les Serbes. Ça peut peut-être casser leur jeu rapide. Ça reste un match relativement équilibré. Pronostiquer cette finale, ce n’est pas si évident que cela.

BS : La Serbie est l’équipe qui dispose du meilleur pourcentage de la Coupe du monde (56 % aux tirs, dont 68,4 % à deux points). Comment l’Allemagne peut-elle s’organiser défensivement pour la limiter ?

Yacine Aouadi : Lorsqu’une équipe est aussi adroite, cela veut dire qu’elle possède une excellente sélection de ses tirs. À partir de ce moment-là, il faut s’organiser et choisir son poison et ne pas ménager ses efforts durant les 40 minutes ! Par exemple, lorsque Canada choisit d’être plus agressif et de trapper avec ou sans réussite Mulitinov, tu déplaces le problème. Tu crées un surnombre en défense, donc tu exposes.

Ce sera un match extrêmement difficile pour les Allemands. Bogdan Bogdanovic est incroyable, car c’est un scoreur, mais il laisse aussi les autres marquer autour de lui. Et autour de lui, il y a des arrières clairement capables de scorer efficacement. Je pense qu’il y a beaucoup plus de danger sur les lignes arrière serbes.

Malgré tout, le secteur intérieur allemand est assez dense et assez agressif, au scoring et au rebond. Du côté serbe, c’est efficace, mais il y a moins de joueurs capables de marquer près du cercle, même si Milutinov est excellent. Peut-être que la différence se fera également là-dessus, mais cela reste équilibré.

BS : Avec deux équipes si complètes, dégager les points forts et les points faibles n’a rien d’évident. Mais si tu devais désigner un facteur X de chaque côté, pour l’Allemagne et la Serbie, lequel serait-ce ?

Yacine Aouadi : Je verrais bien Franz Wagner en facteur X pour l’Allemagne. Il n’y a pas que lui, bien sûr, mais c’est un ailier de grande taille qui est capable de faire très mal sur les lignes arrière. Et j’imagine que le coach va peut-être s’appuyer sur ses ailiers pour apporter des options près du cercle.

Du côté serbe, c’est encore plus dur. On sait que Bogdanovic va devoir encore sortir un gros match, c’est une certitude. Il est exceptionnel depuis le début des phases finales, donc je pense qu’il sera à la hauteur. Mais un facteur X ? Je dirais qu’il n’y a pas de réponse évidente pour une équipe qui brille par son passing game.

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BS : Alors, quel est ton pronostic pour cette finale ?

Yacine Aouadi : J’étais indécis avant que tu m’appelles et je le suis encore un peu (rires). Mais je vais aller du côté allemand. Les chiffres du côté serbe sont incroyables et ils sont réguliers, mais l’Allemagne fait un Mondial exceptionnel. Ils devront sortir un match tout aussi exceptionnel pour gagner cette finale, mais je pense qu’ils en sont capables.

BS : En cas de victoire de l’Allemagne, Dennis Schröder serait ton MVP ?

Yacine Aouadi : Oui, je dirais Schröder pour plein de raisons. Depuis qu’il a intégré la Mannschaft en 2014, il a beaucoup évolué. On l’a vu gagner en maturité, on l’a vu prendre le leadership, on voit bien qu’il fait l’unanimité et qu’il est fédérateur — sans oublier qu’il a toujours de bons mots pour ses coéquipiers et du respect pour l’adversaire en conférence de presse. Et comme tu le sais, je suis associé à la marque Puma, donc voir Schröder remporter le titre de MVP serait également sympa pour la « Puma Fam ».

Je pense que Shai Gilgeous-Alexander peut aussi y prétendre. En tout cas, il fera forcément partie du meilleur cinq de la compétition. Il sera considéré comme l’un des meilleurs joueurs de ce Mondial aux yeux de l’ensemble des passionnés.

BS : Justement, l’une des deux équipes d’Amérique du Nord repartira sans médaille de cette Coupe du monde. Selon toi, ce sera plutôt le Canada ou les États-Unis ?

Yacine Aouadi : Pendant la première preview, on avait dit qu’une finale nord-américaine se profilait, finalement ce sera la petite finale (rires) ! C’est compliqué, mais je vais mettre une pièce sur les Canadiens, l’outsider.

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