"Je dessine au crayon. Si je me plante, je jette la feuille. Avec moi, pas de gomme. Je ne veux pas me retrouver frustré, je ne voulais pas être en colère ou énervé par ça (ndlr : utiliser la gomme). J'ai juste dû continuer à travailler. Peut-être que cela a engendré chez moi un sens de la patience, que j'ai transposé au jeu." "En ce qui concerne les blocks, c'est plus une question d'angles, ceux du joueur qui attaque. Quel angle il prend pour attaquer le cercle, pour attaquer le panneau (ndlr : shooter avec la planche) ou pour dunker. J'essaye de m'ajuster et de me mettre sur son chemin en fonction de cet angle", explique-t-il dans un passionnant article de CBSSports.com, signé Matt Moore.Même le contortionniste Kobe Bryant, qui figure parmi les joueurs les plus difficiles à contrer, a eu le droit à sa "rencontre" cette saison, à la suite d'une aide défensive de Sanders, alors que Monta Ellis venait de se faire passer par la star des Lakers. [youtube hd="0"]http://www.youtube.com/watch?v=Ij26EvM7N88[/youtube] Mais son chef-d'oeuvre, Larry "The Sandman" l'a accompli le 30 novembre dernier, s'offrant un triple-double "par les blocks" (10-12-10) un soir de défaite à Minnesota (95-85). [youtube hd="0"]http://www.youtube.com/watch?v=AUOtTFYTWpU[/youtube] En contenant autant que possible la redoutable paire Nikola Pekovic (14 pts à 5/12, 16 rbds et 5 shoots contrés) - Kevin Love (15 pts à 5/19, 14 rbds et 4 shoots contrés), Sanders a égalé un record de la franchise, détenu par l'illustre Kareem Abdul-Jabbar (10 contres le 3 novembre 1973 contre Detroit). Malgré tout, ce jour-là, le duo des Wolves a aussi gobé 9 rebonds offensifs au cumulé, et Minny l'a emporté. Dans sa quête défensive, celui qui a pour modèle Tyson Chandler tente justement de trouver l'équilibre entre blocks et rebonds défensifs.
"Pas mal de fois, je vais me retrouver en aide,ou sauter trop tôt et rater le contre. Mon gars (ndlr : son adversaire direct) va prendre le rebond et je serai absent. Même si le mec manque son shoot, mon gars sera dans la position parfaite pour une claquette ou un lay-up. J'essaye donc de rester le plus près possible de lui pour le laisser davantage loin du panneau."Il n'empêche, Sanders avait besoin de ce match-référence contre Minnesota, pour placer un repère positif faisant office de charnière dans sa saison. Après une summer league préoccupante en juillet dernier à Vegas, surtout marquée par ses fautes à répétition (un match à 10 fautes, notamment), il avait déjà instantanément rebondi dans le Wisconsin, faisant forte impression au staff des Bucks lors du camp d'entraînement.
"J'ai eu l'impression d'un déclic en ma faveur. J'ai essayé de me montrer persistant. La Summer League aurait pu me décourager. Je n'ai pas joué aussi bien que j'aurais voulu, mais ça fait partie de mon développement et de mon apprentissage", relativisait-il dans les colonnes du Journal Sentinel de Milwaukee.Adepte de l'adage "no pain no gain", Sanders (9,9 pts, 9,6 rbds et 2,9 blocks) fait ainsi partie des joueurs cités dans la course au titre de MIP, au même titre que Greivis Vasquez (NOLA), James Harden, Omer Asik (Houston), Jrue Holiday (Sixers), Nikola Vucevic (Orlando), Paul George (Indy) ou encore Stephen Curry (GS).[superquote pos="d"]"De mon point de vue, c'est lui le MIP" Jim Boylan[/superquote]
"Beaucoup de noms sont jetés sur le papier, mais quand je regarde, je vois des gars qui avaient du succès et qui ont bâti quelque chose dessus", remarque Jim Boylan, le coach des Bucks. "Mais Larry est passé du statut de joueur qui ne joue pas beaucoup du tout à ce qu'il accomplit désormais, à savoir être deuxième de la ligue aux blocks, tout en ayant un impact direct sur le résultat final. De mon point de vue, c'est lui le MIP."A l'image de sa franchise, qui milite actuellement via un blog amusant sur NBA.com (LarryBlocks) pour que Sanders triomphe simultanément dans les courses de MIP et de défenseur de l'année (il est un prétendant légitime), Boylan défend sa paroisse. L'avis du coach des Bucks, cependant, demeure objectif. On parle là d'un joueur qui, en doublant allègrement son temps de jeu (de 12,4 minutes l'an passé à 27,4 cette saison), a progressé dans de nombreux secteurs de jeu. Statistiquement (points, rebonds, passes, blocks…), mais pas que. Tandis que le tandem de dragsters Ellis-Jennings fait feu de tout bois, Sanders pèse dans la raquette des Bucks. Quand il est sur le parquet, Milwaukee est dans le Top 4 des meilleurs défenses de la ligue (98,5 pts encaissés en moyenne sur 100 possessions - cf ici la rubrique "defensive rating").[superquote pos="d"]"Défensivement, on peut s'appuyer sur lui si quelqu'un se fait passer" Ilyasova[/superquote]
"Il a fortement intensifié son jeu", souligne son coéquipier Ersan Ilyasova, 2ème dans la course au… MIP l'an passé (derrière le Magic Ryan Anderson). "Maintenant, il obtient des minutes et il joue vraiment bien, notamment défensivement. On peut s'appuyer sur lui si quelqu'un se fait passer. Il peut contrer les tirs adverses."Sanders a découvert le basket en seconde. Lors de son premier match au lycée, avec Port St. Lucie High School, il marque… dans le panier adverse. Cette saison, il rattrape le temps perdu, en repoussant les tentatives de ses adversaires. Grâce à ses longues tentacules, mais aussi grâce à sa ténacité.
"C'est du 70-30 au mental", répond-il, lorsqu'il est interrogé sur la part de volonté que contient sa défense. "Je ne suis pas aussi costaud que la plupart des types que j'affronte. Aussi grand que je sois, je pourrais faire beaucoup de fautes. (…) C'est surtout une question de mental. Et de positionnement, etc…"Autant que faire se peut, Sanders essaye de convertir ses blocks en ballons gagnés par la défense des Bucks, par le biais, notamment, de contres contre le plexy, qui retombent souvent en même temps que lui, donc dans ses mains. On l'a déjà vu, cette saison, se mettre en travers de la route de Joakim Noah, de Brook Lopez, ou encore de Dwight Howard, qu'il "aime affronter", même si selon lui, le pivot des Lakers est "très bon dans l'art d'obtenir des fautes." Sanders et Howard se sont rencontrés deux fois cette saison. Preuve que le premier cité apprend vite, il s'est rebiffé lors du match retour (21et 13 en 30', contre 15 et 15 pour D12 en 38' - victoire de Milwaukee), après avoir été dominé par son aîné à l'aller (31et 16 pour D12 en 40', 6 et 11 en 24' pour Sanders - victoire de LA). Et puis il y a l'injouable Tim Duncan, que Sanders s'est offert le luxe de contrer, déjà (ils ne sont pas légion…). [youtube hd="0"]http://www.youtube.com/watch?v=rttehU7apX8[/youtube]
"Il est plutôt difficile de défendre sur Tim, parce qu'il est faussement lent", confie Sanders. "Il se déplace à son propre rythme, un peu lent. Quand tu défends sur lui, ce n'est pas seulement près du panier, mais aussi loin du panier. Il est difficile de défendre sur son p'tit "mid-range jumpshot", parce que tu ne peux pas être trop près de lui et te faire battre sur son dribble. Aussi, parce qu'il (Duncan) est long et qu'il peut s'étirer. Mais il prend son temps et s'il voit que tu ralentis (pour venir défendre sur lui), il shoote. Et quand il shoote, tu le paies cash."Shooter, ce n'est pas (encore ?) trop le truc de Sanders, qui atteint souvent sa moyenne de points à coups de claquettes (3,2 rebonds offensifs par match). S'il a amélioré ses pourcentages au tir (de 45,7% à 51,2% au FG, de 47,4% à 61,9% aux LF) et son jeu au poste, Sanders doit désormais se façonner un shoot à mi-distance consistant, comme ses prédécesseurs catalogués défensifs (Noah, Ibaka) avant lui. Il doit aussi continuer à stabiliser son secteur fautes (3,3 par match) et canaliser, parfois, son trop-plein d'enthousiasme, matérialisé par deux expulsions coup sur coup mi-mars, lors de deux défaites à Washington ("Thumbs up !") et contre Miami (après une faute sur LeBron James). Cela lui avait valu une discussion constructive, les yeux dans les yeux, avec son coach.
"Comme je l'ai déjà dit à Larry, ça ne me dérange pas qu'il joue avec émotion, tant que ça ne joue pas des tours à l'équipe", expliquait Boylan après le revers face au Heat.Décidément, tout tourne autour de la Floride pour Sanders, le natif de Fort Pierce, petite ville de 40 000 âmes, à mi-chemin entre Orlando et Miami. Cette nuit, ses Bucks retrouveront le Heat à l'American Airlines Arena, dans un match sans trop d'enjeu. Si ce n'est celui de marquer les esprits, à quelques encablures du plus que probable premier tour Heat Vs Bucks (n°1 vs n°8). Bien sûr, l'upset est impossible. Mais Sanders aura là l'occasion, face au champion en titre dépourvu de big man de poids (no offense Chris), de prouver que sa troisième saison NBA est celle de l'envol. Titre(s) de MIP, défenseur de l'année, et meilleur contreur de l'année ou pas.