Quelques mois en arrière, Mark Daigneault se retrouvait contraint de répondre aux allégations concernant Josh Giddey, dont la relation avec une fille mineure a été exposée sur les réseaux sociaux. Avec évidemment la même réponse du coach, du joueur ou même du Oklahoma City Thunder : « no comment. »
Ce n’était que le début des emmerdes pour le joueur de 21 ans, sifflé dans plusieurs salles, conspué sur la toile mais aussi mis à mal sur le terrain par un nouveau changement de rôle, le troisième en autant de saisons en NBA. L’Australien, sixième choix de la draft 2021, devait apprendre à jouer (un peu) autrement tout en n’étant pas dans les meilleures dispositions pour le faire.
Ses difficultés et le sentiment de stagnation, voire de régression, de son jeu après des débuts prometteurs en ont fait un candidat idéal pour un transfert si jamais la franchise décidait de passer un cap en sacrifiant l’un des membres de son jeune noyau dur pour faire venir un basketteur plus confirmé.
« Giddey est la monnaie d’échange pour un trade », soulignait l’insider Kevin O’Connor en novembre. « Ils doivent le transférer pour prendre un intérieur. Ils ont besoin d’un intérieur à côté de Chet Holmgren. Ce n’est pas contre lui, je pense que c’est un très bon joueur. Mais c’est pour le bien de l’équipe et ce n’est pas non plus un bon ‘fit’ pour lui. Son tir m’inquiète. Je pense qu’il fera une belle et longue carrière mais ça ne sera peut-être à Oklahoma City. »
Mais les dirigeants n’ont pas cédé. Lui non plus. De l’eau a coulé sous les ponts depuis. Le temps a fait son travail. Les détectives aussi. L’enquête menée par la police de Newport – sans qu’aucune plainte ne soit déposée, les policiers ont creusé l’affaire après qu’elle ait explosé sur internet – n’a pas pu permettre d’établir un éventuel crime du joueur. Ce dernier aurait rencontré la jeune adolescente dans une boîte de nuit californienne. Il l’a pensait majeure. Elle avait 16 ans. Lui 19. Les clubs sont normalement interdits aux mineurs, ce qui pouvait constituer un élément de défense pour Josh Giddey en cas de procès. Ça n’ira pas jusque-là.
La menace fantôme
En attendant, les premiers mois ont été très délicats pour lui. Perçu comme le deuxième joueur du projet du Thunder derrière Shai Gilgeous-Alexander, il a subi en interne la montée en puissance de Jalen Williams ainsi que l’arrivée de Chet Holmgren. En seulement quelques mois, il est passé de la deuxième à la quatrième option offensive. Avec nettement moins de ballons à exploiter. Une adaptation très délicate pour un joueur qui brille justement avec son playmaking et sa capacité à driver.
Il fallait se réinventer. Du moins, c’est ce qu’il pensait. Avec la gonfle dans les mains de Gilgeous-Alexander et de Williams, Giddey s’est souvent retrouvé placardé dans un coin – littéralement dans les corners – et souvent tout seul. Pour les défenses adverses, le calcul était vite fait : il valait mieux le laisser prendre ses tirs lointains que d’ouvrir l’accès au cercle aux scoreurs que sont ses deux coéquipiers. Quitte à prendre le risque qu’il punisse. On en revient au constat établi par O’Connor sur le manque de complémentarité entre le joueur et ses partenaires et sur la maladresse du bonhomme.
Avec seulement 32% de réussite derrière l’arc jusqu’au break du All-Star Weekend, il ne représentait pas une menace suffisamment crédible pour les adversaires d’Oklahoma City. Mais le risque de le laisser dégainer est de plus en plus élevé depuis la fin février. Sur ses 20 derniers matches, il a converti 39% de ses tentatives à trois-points. Et ça débloque tout le reste de son jeu… à moins que ce soit tout simplement lui qui a tout débloqué tout seul.
Josh Giddey, atout majeur
La hausse statistique avant et après la coupure est très parlante. Elle coïncide évidemment avec l’annonce de l’abandon de l’investigation à son sujet. Il est passé de 11,5 à 14,3 points, de 44 à 54% aux tirs, de 32 à 39% de loin mais aussi de 6,1 à 6,8 rebonds et de 4,5 à 5 passes par match. Sur ses cinq dernières sorties, avec un SGA diminué voire absent, Giddey a compilé 22,8 points, 63% aux tirs, 52% à trois-points en quasiment 5 tentatives, 9 rebonds et 7,4 passes avec un différentiel moyen de +6,4. Le Thunder a même repris la première place à l’Ouest après l’avoir un temps perdu. Ce retour en force se traduit par une confiance pleinement retrouvée par le jeune homme.
« C’est facile de se sentir bien quand tout va bien. Mais si vous vous attachez trop aux hauts et aux bas, vos émotions deviennent des montagnes russes. J’ai galéré avec ça pendant les 50 premiers matches. Je réfléchissais trop et c’est dur de jouer librement et plein de confiance quand c’est le cas », témoignait l’intéressé.
Pendant des mois, Josh Giddey ne voyait que les résultats de ses tirs, le plus souvent manqué. Comme si toute sa production ne se jugeait qu’à travers son adresse alors que ça n’a jamais été son premier point fort.
Josh Giddey, l’autre pépite du Oklahoma City Thunder
« J’arrivais à la salle en sachant déjà que c’est un intérieur qui allait défendre sur moi et je détestais ça. Et ça m’empêchait même de dormir la nuit précédente. Je ne voyais mon jeu qu’à travers ça. J’ai changé ma mentalité. Je pensais que je devais juste mettre des tirs, je ne voyais que ça comme solution. J’avais tort. J’en ai parlé avec les coaches et on a commencé à réfléchir à la façon dont je pouvais attaquer mes différents adversaires directs. Mais je crois que c’est le moment où j’ai vraiment accepté comment les autres équipes défendaient sur moi que tout a changé. »
Son adresse extérieure lui offre plus d’opportunités, c’est évident, mais il a aussi appris à s’en créer des nouvelles en n’hésitant pas à agresser plus souvent les big men adverses. Parce qu’avec ses 2,03 mètres et son arsenal de flotteurs, Giddey reste un super finisseur. Il a un avantage de vitesse contre les grands et un avantage de taille contre les petits. Le « maillon faible » de l’attaque du Thunder peut vite représenter un cauchemar pour les défenses.
Le plus fou, c’est qu’OKC tournait déjà bien avant qu’il ne repasse un cap. Son évolution, ou du moins le retour à ce qu’il fait de mieux avec de la réussite en plus, peut faire du Thunder un candidat plus que sérieux aux finales de Conférence. Il y a fort à parier que les coaches vont continuer à le laisser libre et à l’inciter à les battre en playoffs. Jusqu’à ce qu’il mette dedans. Il n’est sans doute pas le joueur le plus excitant de son équipe, encore moins le plus populaire, mais il est le potentiel facteur X d’un long parcours au printemps. La carte joker.