Toujours plus haut, encore plus fort
Paris, 12 juillet 2013. Relax, Derrick Rose poursuit sa tournée européenne avec Adidas. On en profite pour rencontrer le bonhomme (Cf. REVERSE #43) dans le onzième arrondissement de la capitale. Le garçon semble posé, il n’hésite pas à parler de sa blessure, des changements qu’elle implique mais aussi de sa ville, Chicago. Nous sommes à quelques mois du début de la saison régulière et la star n’a toujours pas revêtu sa tunique des Bulls dans un match officiel. Pourtant, Rose semble plus confiant que jamais. Il est prêt à en découdre. Physiquement, nous avons été bluffés par sa prise de muscle. Pas de doute, le joueur n’a pas chômé durant cette année « sabbatique ».« J’ai pris quatre à cinq kilos de muscles. Je suis plus rapide et plus explosif. Cette année, j’ai un peu plus de force donc je pense que je pourrai finir mes actions plus durement vers le cercle. »Le ton est donné. Et encore, le natif de Chicago n’a pas encore été vu à l’œuvre. Derrick Rose serait-il encore plus fort ? La question n’est pas restée longtemps sans réponse. S’il estime avoir « gagné 13 centimètres de détente », il n’a rien perdu de sa vitesse d’exécution bien au contraire. Rose n’a pas changé son jeu, il est simplement entré dans une nouvelle dimension, et ce dès la pré-saison. Pour sa première, à Indianapolis face aux Pacers, le meneur de jeu a frappé fort d’entrée. 13 points inscrits mais surtout quelques actions explosives. Avec une première victoire pour les Bulls. Pas de doute, Derrick est bien de retour. Mais ce n’était qu’un avant-goût. La star est ensuite montée en puissance, dominant chacun de ses adversaires match après match, avec une pointe à 32 points face à ces mêmes Pacers quelques jours plus tard. Rose impressionne.
« Je parie que ça a surpris pas mal de monde que je sois revenu comme ça. Mais je savais très bien à quel point j’avais travaillé dur pendant l’intersaison pour être en mesure de jouer. Je ne suis pas encore dans ma meilleure forme. Pour l’instant, je suis capable de contrôler un peu le jeu. Je suppose que quand je serai revenu à la normale, ça va vraiment faire peur », raconte-t-il au Chicago Sun. « Je suis redevenu moi-même mais je suis encore plus explosif », ajoute-t-il à K.C. Johnson, reporter au Chicago Tribune.
Derrick Rose en action
[youtube hd="0"]http://www.youtube.com/watch?v=4rdGZIyVX7Y[/youtube] Même si on évoque souvent ses qualités physiques, Rose a surtout évolué…mentalement. Il est en pleine confiance. Cette même confiance en lui qui lui manquait la saison dernière lorsqu'il ne se sentait pas encore remis à 100% pour revenir au moment des playoffs. Le jeune joueur a certainement fait le bon choix, même si rien n’est encore gagné pour les Bulls (si ce n’est le titre honorifique de vainqueur de la pré-saison avec zéro défaite). Quand on le voit se jeter comme une bombe au milieu de la raquette, on comprend que Rose n’a plus peur.« Je cherche encore plus le contact. Avant j’étais timide. Maintenant je suis habitué à encaisser les chocs. »Gros bosseur, le protégé de Tom Thibodeau a également profité de sa blessure pour changer certaines habitudes. Il estime ainsi être « un meilleur professionnel », il fait désormais très attention à « son alimentation ainsi qu’au fait de bien s’étirer ». Cerise sur le gâteau, Derrick Rose, le garçon taiseux, a peaufiné son leadership.
La vie en Rose
« Désormais, il communique lors de chaque temps-morts. Il met en place des systèmes en défense. Il nous indique où nous placer. Il parle beaucoup plus avec Thibs (le coach), surtout lorsqu’il sent que l'on peut prendre l’avantage quelque part. Il parle beaucoup. Il est comme Thibodeau », témoigne l’intérieur des Bulls Taj Gibson.Lors de son passage à Paris, Derrick Rose nous expliquait qu’il avait regardé beaucoup de matches à la télévision pendant la saison régulière. Il faisait ensuite des résumés à Tom Thibodeau. Les deux hommes se sont ainsi (encore) rapprochés. Meneur par sa position sur le terrain, Rose n’a jamais été considéré comme un point guard gestionnaire capable de mettre ses coéquipiers dans les meilleures conditions. C’est justement cet aspect du jeu qu’il veut améliorer tout en restant très agressif vers le cercle.
[superquote pos="d"]"Si vous n’avez pas de meneur, vous n’avez presque pas d’équipe" Rose[/superquote]« Le meneur de jeu est comme un coach sur le terrain. Tout passe par lui. Si vous n’avez pas de meneur, vous n’avez presque pas d’équipe », explique Rose.Même s’il n’aura sans doute jamais l’instinct d’un Chris Paul ou d’un John Stockton, Rose doit mieux lire le jeu. En effet, les équipes adverses se préparent déjà à le serrer de près, quitte à lui coller plusieurs gars sur le dos. Le Heat (tiens, tiens) avait asphyxié la star en lui flanquant LeBron James himself aux basques en 2011. Rose est prêt à trouver la parade :
« Quand un ailier comme lui (James) vient me serrer de près, on doit trouver des joueurs ouverts. Luol Deng devra prendre l’avantage sur son adversaire direct, on devra jouer intelligemment car ils essayeront de me faire prendre des tirs forcés. »
Un effectif taillé pour vaincre Miami ?
Derrick Rose n’est pas seul. Il est même bien mieux entouré qu’il y a deux ans. Avec Jimmy Butler, Luol Deng, Carlos Boozer et Joakim Noah en plus de leur célèbre numéro un, les Chicago Bulls présentent l’un des cinq les plus effrayants de la ligue.« Je n’ai jamais joué dans une équipe aussi talentueuse », assure Joakim Noah, drafté en 2007 par les Bulls.Un avis partagé par son leader :
« Bien sûr, ils ont gagné plein de matches sans moi, mais je pense que nous sommes une équipe totalement différente lorsque chacun connait son rôle. Même les rookies se comportent comme des vrais professionnels lorsqu’ils rentrent sur le parquet. Sans manquer de respect à mes anciens coéquipiers, c’est la meilleure équipe pour laquelle j’ai joué. Nous avons une chance de remporter le titre. »[caption id="attachment_123140" align="alignleft" width="350"] "C’est la meilleure équipe pour laquelle j’ai joué" Derrick Rose[/caption] Sans Derrick Rose et tout en jonglant avec les blessures des autres cadres (Hinrich, Deng, Noah), les Bulls ont décroché une inattendue cinquième place au sein de la Conférence Est avant d’éliminer les Nets, à Brooklyn, lors d’une septième manche décisive au premier tour des playoffs. Face aux rivaux de South Beach, la bande de Nate Robinson n’a pas fait le poids, s’inclinant en cinq matches (4-1) malgré l’exploit réalisé sur le parquet des Floridiens lors de l’ouverture de la série. La rigueur défensive et la parfaite application des systèmes mis en place par Tom Thibodeau a permis aux Bulls de se maintenir au niveau la saison passée. Avec une année de plus tous ensemble, le collectif chicagoan est plus développé que jamais.
« Il y a un noyau dur qui joue ensemble depuis longtemps maintenant. Donc les joueurs comprennent parfaitement nos méthodes de travail. » Tom Thibodeau. « Sur le papier, ça a de la gueule », explique Luol Deng « Mais je pense que l’on ne fait pas assez attention aux caractères de nos gars. Nous ne sommes pas égoïstes. »Dévoués pour leur coach et dévoués pour leur leader, les joueurs de Chicago forment un groupe soudé prêt à renverser la montagne Miami.
« Ce n’est pas Rose contre LeBron. Ce sont les Bulls face au Heat. On attend de lui qu’il dirige l’équipe, » assure Tom Thibodeau.Le jeu offensif des Bulls passe par Rose mais il ne se résume pas à seul homme. Dans la raquette, Boozer et Noah forment une paire complémentaire. Luol Deng est un couteau suisse capable de scorer dans différentes positions. De plus, ce dernier aborde sa « contract year » et il se doit donc de donner le maximum pour décrocher le pactole l’été prochain (à Chicago ou ailleurs…). L’ailier sud-soudanais s’est parfaitement remis de sa blessure au poignet. Selon lui, « l’absence de Rose a contribué au développement de chacun et maintenant nous allons tous progresser car il nous rend la vie plus facile sur le terrain. » Deng est capable de ralentir LeBron James ou Dwyane Wade. Mieux encore, les Bulls se sont trouvés un nouveau stoppeur, Jimmy Butler.
Jimmy Butler, le facteur X
Jimmy Butler a très peu joué dans le même cinq que Derrick Rose. Les deux joueurs explosifs pourraient pourtant former le backcourt le plus athlétique de toute la ligue cette saison. Véritable poison en défense, un peu à l’instar de Kawhi Leonard à San Antonio, Butler s’est fait un nom la saison dernière. Il a d’abord profité de la blessure de Deng pour gratter du temps de jeu. Sa défense sur Kobe Bryant lui a même valu le surnom de « Kobe stopper ». Petit à petit, le natif de Houston est devenu essentiel à Chicago. Durant les playoffs, il a ainsi enchaîné trois rencontres complètes (!!!!) d’affilée tout en se coltinant Joe Johnson ou Deron Williams puis LeBron James en défense. Arrière ou ailier, Butler a l’occasion de franchir un nouveau cap au côté de Derrick Rose.« Lorsqu’il (Rose) aura la balle, je dois courir devant car il risque de me faire la passe s’il ne trouve pas de solution. Boom, un layup facile ou un trois-points ouvert à l’arrivée. Sur demi-terrain, c’est encore plus facile. Il faut trouver un spot et être prêt à rentrer des tirs ouverts », explique Jimmy Butler.
Jimmy Butler défend sur LeBron et Kobe
[youtube hd="0"]http://www.youtube.com/watch?v=sPxUErecR4k[/youtube] [youtube hd="0"]http://www.youtube.com/watch?v=LHwMkn6tvnE[/youtube] Par l’attention qu’il suscite auprès des défenseurs adverses, Derrick Rose rend la vie plus facile à ses coéquipiers. Deng, Boozer, Dunleavy Jr et donc Butler auront à coup sûr une quantité de tirs ouverts cette saison. L’occasion pour Jimmy (deux fois) de prouver qu’il n’est pas un simple stoppeur.« La majeure partie du temps, les regards seront tournés sur Derrick, on doit donc être prêt à rentrer nos shoots. »Comme chacun sait, les Bulls ont besoin de scoreurs supplémentaires. Surtout, ils ont besoin d’ailiers capables de shooter de loin afin de créer plus d’espaces pour D-Rose, multipliant ainsi les dangers pour la défense adverse. Gros bosseur – comme la grande majorité des joueurs de Chicago – Jimmy Butler a passé l’été à travailler son handle et son shoot, notamment dans les corners.
« Lorsqu’on l’a drafté, on savait qu’il pouvait devenir un bon shooteur », raconte Tom Thibodeau au sujet de son jeune joueur qui aborde là sa troisième saison dans la ligue. « On est confiant. Il a un bon geste et il a beaucoup travaillé. Il a pris confiance en son tir. Il peut mettre des shoots, il l’a prouvé. »Si Jimmy Butler tourne à 13 ou 14 points de moyenne tout en shootant à 38-40% derrière l’arc, les Bulls passeront un (très) gros cap. Même le Heat ne semble pas en mesure d’atteindre un tel niveau si Butler se développe de la sorte.