Le backcourt formé par Dejounte Murray et Trae Young est une formidable association de talents. Encore jeune, ils fêtent respectivement leurs 26 et 24 ans ce 19 septembre, leur anniversaire commun. Les deux All-Stars devront toutefois s’adapter l’un à l’autre pour briller aux Atlanta Hawks.
Le front office a sacrifié trois premiers tours de draft, en plus d’un swap, pour récupérer Murray. Des assets d’une grande valeur, surtout quand ils sont non protégés comme dans ce cas. Un véritable All-In de la part des Hawks et le signe qu’ils croient dur comme fer que ce recrutement leur permettra de passer un cap. Alors, compte tenu des enjeux, le duo Murray-Young doit fonctionner.
Dejounte Murray envoyé par les Spurs aux Hawks !
Deux des plus grands talents de la ligue, sur le même terrain
Le meneur des Spurs est, au premier abord, un merveilleux ajout à cet effectif. Il sort de sa meilleure saison en carrière, lors de laquelle il a enchaîné les triple-doubles et participé au All-Star Game pour la première fois. Il affiche des moyennes de 21,1 points, 9,2 passes et 8,3 rebonds, à 46,2% au tir cette année.
Celui d’Atlanta est, quant à lui, toujours un joueur de premier plan. Visage de la franchise depuis sa draft en 2018, il s’impose chaque année comme l’un des meilleurs scoreurs, shooteurs et créateurs de la NBA. Ses statistiques parlent d’elles-mêmes : 28,4 points, 9,7 passes et 3,4 rebonds par match, à 46% au tir et 38,2% à trois points.
Les deux guards font d’ailleurs partie des seuls cinq joueurs avec des moyennes d’au moins 20 points et 8 passes cette saison. Une catégorie qui inclut également Luka Doncic, James Harden et Darius Garland. Le talent est là, aucun doute.
Trae Young est "extatique" à l’idée de partager le terrain avec son nouveau coéquipier, d’après Chris Haynes de Yahoo Sports. Sa franchise serait persuadée que ce transfert permettra de débloquer son plein potentiel. Mais il devra pour cela accepter de jouer différemment.
Un deuxième créateur n’est pas un problème
Dejounte Murray excelle balle en main. Il a en effet besoin d’avoir la gonfle pour créer des opportunités pour ses coéquipiers. Son partenaire devra alors jouer plus souvent off-ball, un domaine dans lequel il avait fait des progrès sur la saison 2020-21. Young, trop statique, a repris de mauvaises habitudes cette année. On le sait toutefois capable d’évoluer sans ballon et il devra le prouver à nouveau.
C’est une transformation par laquelle est notamment passé Stephen Curry pour devenir le champion qu’il est aujourd’hui. C’est donc ce que l’on peut espérer, dans le meilleur des scénarios, d’un joueur qui lui est comparé depuis le début. Pour beaucoup, la force des Warriors repose sur le jeu off-ball de leur meneur. Les Hawks auraient certainement raison de s’inspirer de la plus grande équipe des 10 dernières années.
"Il n’arrête pas de bouger. Ce serait autre chose s’il portait le ballon et qu’il sortait d’un pick and, puisqu’il n’y a que deux joueurs impliqués. Mais quand il passe le ballon et coupe, il passe à travers la défense. À cause de son mouvement, la personne qui défend sur lui est toujours en alerte, mais tous les autres s’inquiètent aussi. Cette pression constante, ça vous pèse", a commenté Brett Gunning, ancien assistant coach des Rockets qui a souvent affronté Golden State, sur la difficulté de jouer contre Curry.
Il faut également dire qu’Atlanta a rarement donné l’opportunité à Young de briller loin du ballon. La franchise n’a jamais eu de si bon playmaker à côté de lui. Avec le 4e plus haut usage rate de la ligue parmi les joueurs à plus de 30 minutes par match (33,3%), il passe l’écrasante majorité du temps balle en main. Il était plus sollicité que LeBron James aux Lakers ou Nikola Jokic aux Nuggets cette année.
L’arrivée de Dejounte Murray lui permettra ainsi de se décharger d’une partie de ses responsabilités pour se concentrer sur d’autres aspects de son jeu. Le meneur des Spurs sera d’ailleurs, sans équivoque, derrière son coéquipier à la création. Son usage rate est relativement élevé (26,8%), mais il est loin d’être aussi "ball-dominant" que Young. Trouver un équilibre entre les deux sera donc certainement moins difficile qu’il n’y paraît à première vue.
La présence de deux playmakers aux Hawks n’est clairement pas un problème. C’est au contraire quelque chose que Travis Schlenk, le président des opérations basket, cherchait à mettre en place pendant l’intersaison. Ce sera surtout extrêmement utile lorsque leur meneur titulaire sera sur le banc, dans la mesure où l’équipe a eu beaucoup de mal à gérer ces minutes en 2021-2022.
"Je pensais que nous étions vraiment bons et que nous avions un effectif profond cette année. Nous n’étions pas aussi bons et profonds que ce que nous pensions. […] Nous avons besoin de joueurs capables de porter la balle, de créer, et des joueurs plus centrés sur la défense — ou sur les deux", a déclaré Schlenk à la fin de la saison.
Dejounte Murray et Trae Young, des compétences complémentaires
"Les deux", c’est exactement ce que fait Murray. Au-delà de la création, c’est bien la défense qui apparaît comme sa principale qualité. Il a d’ailleurs déjà été décoré pour ses exploits dans ce domaine : meilleur intercepteur de la saison 2021-2022 et surtout All-Defensive Team en 2017-2018. Il est même assez surprenant qu’il ne compte qu’une seule sélection de ce genre.
Le natif de Seattle est un défenseur polyvalent et intelligent, l’un des meilleurs de la ligue à son poste. Il est capable de couvrir plusieurs positions et son engagement physique dans cet exercice n’est plus à prouver.
Trae Young est, au contraire, perçu comme un poids dans ce domaine depuis sa draft. Son impact offensif est immense, mais les Hawks ont tendance à s’améliorer drastiquement sur le plan défensif quand il quitte le terrain. Ils encaissent 114,9 points pour 100 possessions lorsqu’il est sur le parquet, contre 107,8 quand il est sur le banc.
De ce fait, parmi d'autres, les Hawks étaient la 5e pire défense de la NBA l’année dernière, derrière les Wizards et les Pistons. L’arrivée de Dejounte Murray permettra de compenser, au moins partiellement, ces lacunes. Couvrir Young serait déjà une excellente chose.
Au-delà de ses propres responsabilités, Murray est le genre de joueurs capable d’insuffler une véritable énergie à son collectif. Il était considéré, à San Antonio, comme le capitaine de l’équipe. Il ne sera pas celui d’Atlanta, c’est certain, mais sa présence dans le vestiaire et, en tant que relai du coach, sur le terrain pourrait faire toute la différence. Essentiellement pour organiser et stimuler la défense.
"Il a une bonne façon de se connecter à nous, les jeunes, et de délivrer le message de manière à nous motiver. C’est un leader extraordinaire. […] C’est comme un vrai grand frère, sur et en dehors du terrain. Il a toujours été mon mentor", a témoigné Keldon Johnson, son coéquipier aux Spurs.
Finalistes de conférence en 2021, les Hawks ont d’immenses ambitions sur le court à moyen terme. L’objectif affiché est clairement de jouer le titre le plus tôt possible. La force mentale et le sens du collectif de leur nouvelle recrue, authentique produit de l’école Gregg Popovich, les aideront considérablement dans ce sens.
"Si (mes coéquipiers) réussissent, c’est toute l’équipe qui réussit. Pour moi, ce n’est pas difficile. J’aime le jeu. J’aime mon travail. […] Je suis frustré et en colère quand mon équipe perd, alors j’essaie de trouver des moyens de m’améliorer et d’aider l’équipe", a assuré Murray.
Et si les qualités de l’un compensent les défauts de l’autre, la réciproque est tout aussi vraie. Dejounte Murray est un joueur all-around, capable d’à peu près tout sur le terrain. Son tir apparaît néanmoins comme son seul véritable point faible. Ses 32,7% à trois points et 79,4% sur la ligne des lancers représentent la plus grande faille dans son skillset.
Ce n’est pas un hasard si c’est justement la grande spécialité de Trae Young. Ses 38,2% à trois points, sur l’un des plus gros volumes de la ligue, en disent long. Des chiffres Curry-esque, malgré la difficulté de ses tirs, souvent en pull-up et régulièrement loin derrière la ligne. Ses 90,4% aux lancers sont aussi dans les plus hauts taux de réussite de la NBA.
Pas de panique, donc, si ces deux joueurs ne savent pas tout faire sur un parquet. Ils seront capables d’éclaircir les zones d’ombre de l’autre. Une complémentarité qui vend du rêve en match, mais également à l’entraînement, où ils pourront mutuellement s’aider dans leur progression.
Dejounte Murray et Trae Young auront besoin d’un temps d’adaptation pour apprendre à jouer ensemble, c’est évident. On peut toutefois espérer qu’ils formeront rapidement un backcourt aussi fusionnel qu’efficace. Les Hawks ont pris de grands risques pour concrétiser ce projet. Il faut maintenant que la réalité du parquet soit à la hauteur des attentes formulées sur le papier.