Corey « Homicide » Williams – Hommage à une terreur du streetball

Après des années à détruire la concurrence sur le bitume new-yorkais, Corey Williams aka Homicide nous a quittés. Repose en paix.

Corey « Homicide » Williams – Hommage à une terreur du streetball

Tous ceux qui ont suivi les débuts de REVERSE et BasketSession savent à quel point nous étions et sommes attachés à l'histoire du streetball. C'est donc avec beaucoup d'émotions et de tristesse que nous avons appris le décès d'une de ses plus grandes - et de ses dernières - légendes. Corey Williams, aka Homicide, nous a quittés à 46 ans, victime d'un cancer, après des années à avoir surmonté les échecs et l'adversité, à avoir mis à l'amende (d'où ce surnom iconique) toutes les têtes d'affiche du basket de rue qui ont osé le défier sur le bitume. Nous avions eu la chance de le rencontrer en 2010 à New York, mais nous vous parlions de lui dès le 7ème numéro de REVERSE, en 2006. C'est cet article que nous vous proposons de relire ci-dessous.

Que la terre te soit légère, Corey.

 

COREY WILLIAMS - HOMICIDE VOLONTAIRE

Légende du streetball new-yorkais, Corey Williams a dû subir plusieurs échecs avant de réaliser qu’il pouvait toujours rêver de NBA...

PAR ALMAMY SOUMAH

LÉGENDE DU STREET

Été 2000. Corey Williams signe son retour à New York City après 4 ans d’absence. Sans contrat et sans club en vue, il décide de prendre part à l’E.B.C., à Rucker Park, pour faire son « come back » à Big Apple. Fraîchement débarqué de l’Alabama où il étudiait, Corey revient avec la ferme intention de marquer les esprits espérant ainsi s’ouvrir de nouvelles portes. C’est donc sans hésitation qu’il plonge dans le bain du plus célèbre tournoi de Streetball. Dès son premier game, son style de jeu provoque l’hystérie du public. Sa collection de moves prêts à l’emploi va choquer plus d’un spectateur. Tous les défenseurs qui lui sont opposés vont succomber sous les assauts mortels du phénomène. Le nombre croissant de victimes qu’il fait à chaque sortie pousse les speakers de l’EBC à lui trouver un surnom. Ce sera d’abord C-Murder, mais pour ne pas faire doublon avec un rappeur célèbre les speakers le rebaptiseront HOMICIDE, en accord avec son jeu meurtrier. En plus d’allier l’art et la manière, Homicide finit toujours ses contrats avec des fiches qui oscillent entre 30 et 40 points. De tournois en tournois, Homicide multiplie les exactions se construisant ainsi une légende dans le streetball new yorkais.

AU DÉBUT...

Comme beaucoup de joueurs, rien ne laisse présager à l’entame de sa carrière que Corey Williams a la capacité d’élever son niveau de jeu vers les sommets. Parti de rien, CW plonge tardivement dans le basket. Pourtant, il ne pouvait rêver meilleur début puisque sa mère l’inscrit dans un lycée pour garçons qui n’est autre que le célèbre « Rice » de New York. Ce qu’elle ne sait pas, c’est que son fils intègre dès lors une véritable plate-forme de basket formatrice de talents. Sujet à la rigueur de Rice, Corey devient vite un « Role Player » ayant pour charge de mettre en place les systèmes, faire briller les autres et apporter une grosse densité défensive. Cette mission qu’il remplit à merveilles ne lui sera pas profitable. Elle va limiter son champs d’actions et par conséquent l’intérêt des grandes universités à son égard.

Pour pouvoir étudier, il est contraint d’opter pour un Junior College (JuCo). Rester à N.Y. le forcerait à se cantonner à son rôle de meneur académique. Corey choisit donc l’exil à Kansas City Missouri pour se reconstruire une nouvelle image et développer son jeu. Décidé à devenir un scoreur, il ne lui faudra que deux ans pour exploser. Sa 2e année de JuCo le voit sacré MVP de sa ligue et sélectionné dans la « First Team JuCo All-American ». Il finit dans le top 5 des scoreurs du pays avec plus de 25 pts par match et obtient quasiment tous les honneurs possibles, si ce n’est le titre de champion. Convaincu d’avoir fait ce qu’il fallait pour décrocher le gros lot, Corey doit finalement déchanter lorsque seul Alabama State Univ. lui fait une proposition concrète pour rejoindre la NCAA. Après une année junior prometteuse avec un rendement supérieur à 15 pts par match, Corey est oublié sur le banc pour sa dernière année. Les résultats de l’équipe poussant son coach à tirer rapidement un trait sur la saison tueront ses rêves de NBA.

EN ATTENDANT...

A défaut d’avoir une situation stable à sa sortie d’école, Corey Williams tire profit de ses skills pour gagner sa vie. Son premier job consiste à jouer pour les New York Nationals. Équipe professionnelle ? Pas du tout ! Les New York Nationals forment une équipe payée pour perdre tous les soirs contre les Harlem Globe Trotters en tournée nationale. Autant dire que CW était en droit d’espérer bien plus après l’université. De 2001 à 2004, il multiplie les expériences en 1ère ligue (Brésil, Vénézuela, Chine, Italie, Suède, etc…) avec en ligne de mire la volonté de perfectionner son jeu pour s’ouvrir un jour les portes de la NBA. Mais en tant que père de famille, la stabilité devient capitale. Alors Corey s’attaque à la Liga ACB en participant à un camp de recrutement en Espagne. L’objectif étant de jouer dans cette ligue où les scouts NBA pourront garder un œil sur lui. Homicide finit MVP, mais son image de joueur « Street » associé au fait qu’il mette l’accent sur le scoring ne séduit pas les coachs. Bredouille, il rentre à Denver où sa famille a déménagé.

LA CONFIRMATION

De retour à Denver, Homicide reçoit un appel de l’équipe Don Diva pour rejoindre Rucker. Avec une famille à charge, il ne peut plus se permettre d’aller jouer l’été sur les playgrounds. Il décline donc l’invitation, mais Don Diva aura le dernier mot. Ils proposent de payer ses allers/retours (Denver – N.Y.) et de le payer à chaque match, Homicide accepte et rejoint Bone Collector Williams pour former la paire d’arrière la plus dangereuse de Rucker : « Pick your poison ». Les deux joueurs vont fumer la saison. Tony Hoston, coach d’une équipe concurrente, fait appel à Ron Artest qui vient tout juste d’obtenir son titre de « NBA Defensive Player of the year » pour contenir Homicide en ½ finale. 1,88 m contre 1,98m pour Ron Artest, Homicide prend quelques contres avant de se réveiller et scorer 26 points sur le meilleur défenseur de l’année en moins de 30 minutes. Temps mort ! Homicide confirme sa légendaire capacité à tuer ses vis-à-vis et termine MVP de l’EBC Rucker Park 2004.

Les magazines comme Slam ou Streetball sont passés au travers de ses performances, ce qui a le don de froisser Homicide qui jure de revenir faire l’enfer au Streetball en 2005. « L’été suivant j’ai fermé tous les clapets de N.Y. ! Du début à la fin de l’été. Dès le 1er game à Dyckman, j’ai collé 46 points. J’ai joué dans chaque quartier (Bronx, Harlem, Brooklyn, Queens et Manhattan) et j’ai brillé partout. Pour le 25ème anniversaire de Rucker, j’ai « shut down » (éteint) Alimoe avec qui j’avais un différend (Voir basketsession.com), il finit à 7 pts et 5 fautes, moi je termine avec la reconnaissance et 44 pts au compteur ». Cette même année, Jim Todd, Assistant coach des Raptors, vient voir le 7ème match de Corey à Dyckman Park sur les conseils de Tony Parker, coach d’une sélection américaine dont Homicide a fait partie en Chine. Accompagné de Charlie Villanueva, Jim Todd en aura pour son compte. Homicide score 28 pts rien qu’en 1ère mi-temps et distille plus d’une dizaine de passes lorsqu’il est sujet aux prises à deux voire à trois. Son gros match lui vaudra une standing ovation du public. Jim Todd est convaincu du talent de Corey qui participe au Training Camp des Raptors. Malgré sa bonne pré-saison, il sera le dernier joueur coupé, Toronto ne souhaitant garder que deux meneurs. Mais Corey garde la foi, il signe aux Sioux Falls en CBA et finit meilleur passeur, First Team All Defense, et Second Team All CBA.

LE MESSAGE

« Ne pensez pas que le Streetball n’est pas une véritable issue » (NDLR pouvant vous donner accès au plus haut niveau). Homicide n’a pas encore atteint son objectif mais il n’en est plus loin. Aujourd’hui, il participe au Training Camp des Denver Nuggets et espère bien décrocher son premier contrat. Mais ce n’est pas tout, il vient de signer un contrat avec K1X dont il représentera les couleurs aux côtés de Ron Artest. « Je suis le 1er Streetballer de l’histoire à signer un gros contrat avec un gros équipementier tout en n’étant pas en NBA ».