C’est pendant l’été 1976 que le nom de Billy Rieser commence à circuler à Harlem. Cet ado de 15 ans joue alors sans démériter face à des légendes du bitume telles que Joe Hammond, Herman « Helicopter » Knowings ou Earl Manigault, sur les playgrounds de Jefferson Park ou La Guardia Memorial House.
Très vite, les gens se déplacent pour voir le jeu de ce blanc qui dunke férocement sur tout le monde. On raconte qu’à La Guardia, il postérisait tellement violemment les héros afro-américains locaux qu’il est arrivé plusieurs fois que des spectateurs en colère jettent leurs sièges en sa direction. Il gagne vite le surnom de « White Jesus », tant son jeu puissant et complet est aussi miraculeux que celui d’Earl « Black Jesus » Monroe avant lui.
Même Earl Manigault est sous le charme. Après un gros match, il prend à part le phénomène :
« Il était défoncé, mais vraiment défoncé, et pourtant il a pris le temps de me dire ‘Young fella, tu seras un grand joueur NCAA un jour, tu feras les JO, et tu seras un grand pro. Continue simplement comme tu le fais’ », relate Billy Rieser.
Streetball Tale : Joe Hammond, ou quand la rue détruit les Lakers
Le GOAT n’est pas le seul à être impressionné. Le coach de la Benjamin Franklin High School l’arrache à son lycée. Il devient l’un des quatre blancs d’un lycée fréquenté par des jeunes parmi les plus pauvres de Harlem. Les menaces et intimidations qu’il subit les premiers jours cessent vite quand son talent permet à Franklin High de retrouver les sommets du basket lycéen new-yorkais.
Mais c’est surtout sur la plus grande scène du basket des seventies qu’il écrit sa légende : Rucker Park.
En 1978, son 1,10 m de détente – il mesurait 1,94 m – et ses posters surpuissants font de lui l’un des ballers les plus aimés du terrain le plus relevé de Big Apple. Quelques semaines après, il entre en NCAA. Des gros programmes comme St. John’s, North Carolina, Notre Dame, Purdue, Louisville et UCLA avaient cherché à l’enrôler.
Il atterrit pourtant dans la minuscule fac de Centenary College : un ancien élève, magnat du pétrole, veut absolument qu’il joue dans son équipe, lui lâche une belle somme et lui paie une caisse. Après une grosse saison, il s’explose le genou. Son coach ne le croit plus capable de jouer et le laisse partir. Billy Rieser semble mort pour le basket.
White Jesus ressuscite pourtant sur les terrains de Rucker où, même sans genou, il utilise ses fondamentaux pour dominer. Malgré des propositions, notamment en France, il met un terme à sa carrière, ne supportant plus d’être privé de son jump, ce don que Dieu avait fait au White Jesus.
S'en suit alors une descente aux enfers où se mêlent alcool, drogues et femmes. Il trouve, comme beaucoup de stars déchues, sa rédemption dans la religion. Billy Rieser, qui officie aujourd'hui dans une église de la banlieue de Chicago, s'est raconté dans une biographie, "They Called Me White Jesus, now I'm something more", parue en 2009.
Quand Bob Cousy et les meilleurs streetballers brillaient à la montagne